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Par France Hatron 

Sortie : le 28 janvier 2015

A partir de 15 ans 

Photo 2 tempsDurée : 1h25

Un film franco-canadien 

Genre : Drame

Réalisation : Christophe Cousin

Distribution : Zacharie Chasseriaud, Antoine L’Ecuyer, Aure Atika…

 

Après le décès de son père, Victor et sa mère ont quitté la France pour le Québec. En s’aventurant sur le toit de son lycée, Victor aperçoit un adolescent prêt à sauter dans le vide. Il pose alors la main sur son épaule. Surpris, le jeune entame sa chute meurtrière. Victor récupère le baladeur MP3 du défunt François, et prend la fuite. Viennent ensuite le début d’un flirt avec une jeune fille du lycée et l’interrogatoire de la police. Après Victor, c’est au tour d’un ami du défunt de témoigner.

Photo 2 temps 3Victor se sent mal dans sa peau. Il reproche à sa mère de travailler de nuit et d’avoir quitté la France où elle avait un « bon boulot » et lui « des potes ». Lors d’une ballade nocturne au bord d’une rivière à fort courant, Victor parvient à sauver Samuel tombé à l’eau. Le jour de l’enterrement de François, Victor avoue à la mère du défunt sa présence sur le toit lors du drame…

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Ce premier film se saisit d’entrée de jeu des préoccupations d’un adolescent presque lambda qui a perdu son père. On sent la violence qu’il a en lui lorsqu’il confie à sa psy : «  j’aimerais bien être torero ». Une façon de reprendre les rennes de sa vie en extirpant ses blessures par la violence. Mais la psy le replace dans la réalité du monde adulte : «Bon… Quelque chose de réaliste ». A partir de là, son parcours n’aura rien d’un rêve. Le suicide de son camarade sous ses yeux le replonge dans le deuil déjà lourdement éprouvé par le départ de son père. Victor passe son temps à errer, tripoter son portable, le plus souvent sans mot dire. Il cherche à établir un lien moins superficiel avec sa mère mais qui s’avère aussi stérile que les dialogues du film sont creux. L’ambiance dramatique néanmoins bien rendue – rehaussée par l’atypique format carré du film – ne réussit pas à nous faire oublier le scénario peu structuré qui nous promène d’une intention à l’autre, avec hésitation, sans grande émotion, et nous plonge souvent dans l’ennui. On cherche des liens entre les séquences qui, filmées dans le désordre, n’auraient pas changé grand-chose au déroulé de l’histoire. Quant à la direction d’acteurs, bien épurée, elle n’avantage pas les comédiens. Les thèmes de la première relation amoureuse, du désir de l’autre, des pulsions suicidaires, de la responsabilité des images et des actes, de même que celle du deuil partagé et de la culpabilité sont certes évoqués mais quasi avortés.

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Quand Victor découvre dans le portable de François une vidéo d’un jeune (supposé être François) respirant dans un sac en plastic, on ne sait pas si le personnage est victime ou consentant, s’il pratique un jeu, s’il a décidé de mourir asphyxié devant un témoin qui filme. Ou bien s’il est contraint de respirer dans le sac jusqu’à peut-être perdre la vie. Cette scène s’avère étrange et dérangeante. A cause de cette totale liberté donnée pour appréhender des thèmes aussi préoccupants que l’appel à mourir et le passage à l’acte, souffle comme un vent de malaise sur toute cette histoire.

 

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Pour la première fois de l’histoire du Festival de Cannes, deux personnalités présideront son Jury de la Sélection Officielle.

Les cinéastes américains Joel et Ethan Coen ont accepté l’invitation du Président Pierre Lescure et du Délégué général Thierry Frémaux à devenir les Présidents de la 68e édition du Festival. Le tapis rouge fait place à l’humour noir et macabre qui séduit à la fois la critique et le public.

« Nous sommes très heureux de revenir à Cannes » ont déclaré Joel (60 ans) et Ethan Coen (57 ans) qui tournent actuellement Hail Caesar!, avec George Clooney, Christophe Lambert, Scarlett Johansson, Tilda Swinton, Josh Brolin et Channing Tatum. « Nous sommes surtout heureux de l’opportunité qui nous est offerte de voir des films venus du monde entier. Cannes est un festival qui, dès le début de notre carrière, a toujours joué un rôle important pour nous. Et être Présidents du Jury, cette année à Cannes, est d’autant plus un honneur que nous n’avons jamais été Présidents de quoi que ce soit. D’ailleurs, à ce titre, nous ne manquerons pas de nous exprimer le moment venu ! »

Les frères Coen, indissociables depuis bientôt 30 ans, sont un peu comme chez eux à Cannes depuis longtemps. En 1991, leur « Barton Fink » y a remporté la Palme d’Or, puis « Fargo » s’est distingué en 1996 par le prix de la mise en scène, tout comme « The Man who wasn’t there » en 2001. Leur dernière récompense cannoise, le Grand Prix, date de 2013 pour « Inside Llewyn Davis ».

Ils ont également remporté 138 prix dans le monde, selon le site IMDb.

 On se réjouit de recevoir deux artistes aussi complets – à la fois scénaristes, réalisateurs, producteurs et monteurs – à la tête du plus prestigieux jury au monde. Welcome home Coen brothers !

Par France Hatron Ceci est mon corps

Sortie : le 10 décembre 2014

A partir de 15 ans

Durée : 1h34

Une comédie française

Réalisation :  Jérôme Soubeyrand

Distribution : Jérôme Soubeyrand, Marina Tomé, Christophe Alévêque, Laetitia Lopez, Hervé Dubourjal, Julie Nicolet, Pierre-Loup Rajot et Hervé Blanc

Et avec la participation amicale de : Michel Serres, Michel Onfray et Bruno Clavier 

Un prêtre nommé Gabin rencontre Marlène, une actrice délurée, drôle et touchante lors d’une thérapie de groupe. Il en tombe amoureux et décide de la retrouver à Paris. Il se présente à son domicile – une maison –  sans prévenir et s’impose par une présence de plus en plus encombrante. Il découvre la vie en communauté, sans foi ni loi, légère à souhait. Ses appréhensions du départ se transforment petit à petit en curiosité puis en plaisir de chaque instant. Parallèlement au déroulé de l’histoire, s’ajoutent les témoignages des philosophes Michel Serres et Michel Onfray sur la question de la séparation du corps et de l’esprit dans le christianisme, abordée dans les épîtres de Saint Paul. On assiste également à une séance de psychanalyse transgénérationnelle avec Bruno Clavier qui porte un secret de famille pas banal !

Ce film est très bien écrit. Ses dialogues pertinents et drôles, déclamés par des comédiens toujours justes nous régalent du début à la fin.

 

 

Par Olivier Pélisson praiadofuturo_aff_400x533.indd

 

Sortie : 3 décembre 2014

Durée : 1h47
Un film germano-brésilien
Genre : Mélodrame
Réalisation : Karim Aïnouz
Distribution : Wagner Moura, Clemens Schick, Jesuita Barbosa, Savio Ygor Ramos

 

Praia do futuro (« plage de l’avenir »). Fortaleza. Etat du Ceará. Nordeste. Brésil. C’est dans cette grande ville côtière et isolée du pays que Donato et Konrad croisent leur route. Le premier, le Brésilien, est maître-nageur. Mécanicien de motos à Berlin, le second, l’Allemand, traverse l’Amérique du sud en bécane avec son meilleur ami, qui meurt noyé, emporté par les vagues brésiliennes. Les regards et les corps parlent, et les deux hommes tombent instantanément dans les bras l’un de l’autre. Le chaud et le froid, le tropical et le continental, l’ici et l’ailleurs, la confrontation fait des étincelles. Mais les mots sont rares. Car ces deux héros des temps modernes sont taiseux. Ils se donnent avant tout à leurs pulsions. Et Donato suit Konrad avec évidence vers l’Allemagne, laissant les siens, dont son petit frère, Ayrton, qui a tant besoin de son aîné…

C016_C001_0927UCKarim Aïnouz filme inlassablement la dualité de l’être humain, jusqu’à la dichotomie intérieure, qui pousse les personnages à agir, à bouger, à partir, à larguer les amarres, pour un jour ou pour une vie. Madame Satã, Le Ciel de Suely, Viajo porque preciso, volto porque te amo, O Abismo prateado, autant de trajectoires bouleversées qu’il suit avec acuité et bienveillance, sans aucun jugement moral. Les deux premiers sont sortis en France, les deux suivants non, malgré leur présentation à Venise (Viajo) et Cannes (O Abismo). Cet éternel balancement existentiel et cette dualité trouvent leur source dans le trajet même du cinéaste, né à Fortaleza au Brésil, et résidant actuel à Berlin, et ce cinquième long résulte de la réunion de ses deux pays, de ses deux terres, de ses deux mondes.

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Au pays des taiseux, le corps est roi. Aïnouz et son scénariste Felipe Brangança font pleinement surgir les personnages par leur déplacement, leur mouvement, et le réalisateur filme avant tout des corps dans l’espace et dans le cadre de sa caméra. Il excelle à inscrire la peau comme paysage projeté dans l’espace architectural des villes et dans l’immensité de la nature, de la chaleur « nordestine » de l’Océan Atlantique à la froideur de la Mer du Nord. Une peau qui domine dans cette peinture du désir, de l’amour, et du « saudade » incessant de ce qui a été et qui n’est plus. Les corps courent, plongent, sautent, nagent, roulent, frappent et fendent la vitesse. Mais le tempo n’est pas à l’engloutissement vorace du temps. Plutôt au déroulement alangui des choses.

Photo Paia 2Le réalisateur brésilien reste un adepte de la sensation plutôt que de la psychologie, de l’expérience plutôt que de l’explication. Il utilise l’ellipse pour passer d’un pays à l’autre, d’un moment à un autre. Seuls comptes les rencontres, les croisements, les retrouvailles. Tout comme il construit ses cadres avec l’œil précis de l’étudiant en architecture qu’il a été et du plasticien qu’il est. Et ça marche. Car, transcendé par son esthétique stylisée et son parti-pris sensoriel, Praia do futuro transpire du désir intense et mélancolique de ses personnages, de leurs manques et de leurs élans. Les éléments, les saisons révèlent et accompagnent l’état intérieur des êtres, pour lesquels le Brésilien Wagner Moura et l’Allemand Clemens Schick réussissent ensemble à incarner l’amour imprévu et improbable, au-delà des océans, au-delà de la raison. C005_C010_0919AN

 

Par France Hatron Marie Heurtin

Sortie : le 12 novembre

Durée : 1h35 min

Un film français

Réalisation : Jean-Pierre Ameris

Distribution : Isabelle Carré, Ariana Rivoire

 

Par France Hatron Mary 1

 

Sortie : 12 novembre 2014 

Durée : 2h00 min

Un film franco-suisse

Genre : Biopic, Drame, Romance

Réalisation : Thomas Imbach

Distribution :

Camille Rutherford, Sean Biggerstaff, Aneurin Barnard, Edward Hogg, Mehdi Dehbi… 

 

En 1587, la reine d’Ecosse Mary Stuart s’apprête à mourir. En voix off : la lecture de sa dernière lettre à sa cousine Elizabeth, reine d’Angleterre. En flash back, Mary vient au monde, est couronnée reine d’Ecosse, apprend à marcher avec distinction. Mary 4Sans sa mère, elle embarque, à 5 ans, pour la France où elle est éduquée à la Cour. A 15 ans, elle épouse François de France et devient également reine de France lorsque son époux accède au trône deux ans plus tard. Quand ce dernier se voit emporter par la maladie, la jeune veuve rejoint l’Ecosse dévastée par la guerre. Au même moment, sa cousine Elisabeth est sacrée reine d’Angleterre.

May 2Mary se remarie à 22 ans avec son cousin Lord Darnley, un meneur du parti catholique qui se montre très vite vaniteux et désireux de jouir de son titre de roi. Jaloux de la complicité qu’entretient sa femme avec son secrétaire particulier Rizzio, Darnley supprime le supposé amant. C’est la fin du mariage royal. Mary donne pourtant naissance à un héritier : Jacques Ier d’Angleterre ou Jacques VI d’Ecosse. Mais elle réalise que l’amour de sa vie est le Comte Bothwell, un protestant rencontré sur le navire qui l’a ramenée de France. Elle tombe enceinte de lui et l’épouse après avoir fait tuer son mari. Rejetée par l’aristocratie et le peuple écossais, horrifiés par son geste et sa passion amoureuse, Mary demande de l’aide à sa cousine Elisabeth qui la fait emprisonner et finalement décapiter 19 ans plus tard.

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Inspiré de l’œuvre Marie Stuart de Stefan Sweig, ce film aux artifices théâtraux dévoile la face privée de l’intrigante reine d’Ecosse, qui fut à la fois une martyre et une meurtrière. La trame de ce biopic psychologique dramatique est centrée sur l’adoration que voue Mary à sa cousine, la reine Elizabeth qu’elle qualifie de « sœur » mais aussi de « rivale et d’ennemie mortelle ». Dans sa correspondance qui rythme le film, elle lui dévoile ses secrets et angoisses. Toute sa vie, elle attendra d’elle : amour, reconnaissance et compassion.  Un parti pris certes intéressant mais qui imposait de contextualiser l’histoire dans l’Histoire. Le meilleur conseil donc avant de voir ce film : connaître la vie de Marie Stuart pour en comprendre et en apprécier tous les revers déroulés dans ce scénario confus. N’apparaissent pas les repères de dates, ni la scène de couronnement de la reine bébé, ni celle de son deuxième mariage. Pas de plan non plus sur Elizabeth. Autant d’ellipses qui empêchent de bien situer l’héroïne romantique – insoumise, séductrice, parfois frivole, libre d’aimer qui elle veut, prête à tout pour que Protestants et Catholiques vivent en paix – dans son époque et sa fonction.

Henri 2bisA souligner néanmoins : la beauté de l’image en général et particulièrement celle des plans de l’infortunée Mary. Son interprète, Camille Rutherford possède le minois, le port de tête et la grâce adéquates pour incarner cette figure atypique. Mais son allocution théâtrale, lente, la laisse un peu en marge de son jeu. Les tourments de la reine sont en revanche bien rendus sur les paysages embrumés, austères, portés par une musique dissonante macabre. Une scène forte retient aussi l’attention : celle des canards restés pour seuls compagnons de Mary dans la cour du château lorsque sonne son déclin. Le pari ambitieux de Thomas Imbach de ne dresser qu’un portrait psychologique en s’éloignant du traditionnel film historique n’est, vous l’aurez compris, que partiellement tenu.

 

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Par France Hatron Affiche une nouvelle amie

 

Sortie :

5 novembre 2014 

Durée : 1h48 min

Un film français

Genre :

Comédie dramatique

Réalisation :

François Ozon

Distribution :

Romain Duris, Anaïs Demoustier…

 

 

 

 

Deux amies très proches rencontrent leur futur mari presque en même temps et  l’épousent presque simultanément.  L’effet miroir s’arrête là… Laura et David ont une fille, Lucie, qui ne verra pas sa mère grandir puisqu’elle meurt d’une grave maladie peu de temps après son accouchement. Aux obsèques Claire – devenue la marraine de Lucie – prononce un discours d’adieu à son amie chère. Elle lui promet de veiller sur David et Lucie.

Amie 1Pour surmonter le choc et l’absence de sa moitié tant aimée, David se travestit en femme avec ses vêtements, espérant ainsi calmer sa fille. Il lui donnera désormais le biberon, en perruque et maquillé. Il faut dire que « Se retrouver seul avec un enfant à élever, c’est trop dur ». Le ton est donné… La métamorphose exprimant un désir qui remonte à son enfance,  elle n’aura rien d’éphémère. Au début Claire ne comprend pas son ami. Elle préfère d’ailleurs cacher à son mari l’énorme secret qui la lie à David. Mais, petit à petit elle accepte son nouvel ami il est, le défend, fait du shopping « entre femmes », et lui trouve même un nouveau prénom : Virginia.

Amie 2

De son côté, Claire se métamorphose autant que David. Elle devient plus féminine et vraiment libre, apprivoisant une personnalité plus proche de son identité profonde. Son personnage est finalement aussi central que celui de David. Chacun à sa manière, tâtonne et change de vie en se réinventant.

Leur relation légère et grave à la fois, touche intrigue et dérange. Notre malaise s’installe. Ozon ne cesse de brouiller les pistes, nous laisse croire à des coups de théâtre qui n’arrivent pas, surprend sans clichés. Il raconte une histoire pas banale sans juger. Il aime profondément ses personnages et il a beau pousser loin, très loin ses acteurs, ils s’en sortent miraculeusement bien.

Amie 3On retiendra « la » scène inoubliable du film qui résume à la perfection les tourments et la beauté intérieure de Claire et David : celle de leur soirée dans un night club ringard où un travesti interprète Une femme avec toi de Nicole Croisille. David se retrouve dans cet homme transformé et il en pleure, mais pas de joie. Claire est, elle, chamboulée par le spectacle mais aussi éblouie. Son regard en dit long sur la métamorphose de tout son être. Elle a réellement pris conscience de ce qu’est devenu son ami et s’en accommode au bout du compte mieux que lui. Ni son éducation, ni son engagement marital ne freineront plus ses sentiments.

Amie 5

Avec Une nouvelle amie, Ozon confirme qu’il aime les femmes et qu’il adore les mettre en danger. Il nous a habitués, dans la plupart de ses films (Jeune & Jolie, Potiche, Le Refuge, Swimming Pool…) à jouer avec leurs sentiments et leurs limites sans jamais les soumettre à qui que ce soit parce qu’il les aime libres. Il renouvelle ici l’expérience et ose une fois de plus outrepasser les codes du « bien pensant ». Son audace atteint là son apothéose.

 

 

Par Olivier Pélisson Lili Rose1

 

Sortie : 22 octobre 2014 

Durée : 1h30

Un film français

Genre : Road movie

Réalisation :

Bruno Ballouard

Distribution :

Salomé Stévenin, Mehdi Dehbi, Bruno Clairefond, Thomas Chabrol, Catherine Jacob 

 

Une fille. Deux garçons. Un trio imprévu qui prend la route sur un coup de tête. On a déjà vu ça sur grand écran. Et pourtant… LILI ROSE réussit à créer de l’inédit et à installer un ton, une musique, dans un premier long métrage tout en douceur.

Samir bosse comme ouvrier. Xavier vit de coups au poker. Un soir, ils rencontrent Liza, la future femme d’un pote du second qui les a invités à sa fête. Promise à une vie rangée, mais déçue par son mec en pleine soirée, elle part errer dans les rues et les deux amis la récupèrent. Commence une virée improvisée qui se prolonge en une parenthèse enchantée. Le temps de prendre le large, au bord de la mer, justement. Ailleurs que dans l’espace balisé par leur quotidien. Histoire de fuir les questions. Ou de les questionner en creux. Qu’a-t-on fait de sa vie ? S’est-on engagé sur la bonne voie ? Avec la bonne personne ? Est-on à la bonne place ? A trente, quarante ou cinquante ans, les personnages jouent leur destin à leur manière.

LILI ROSE - 7Les paysages de la côte bretonne ajoutent à cette ouverture mentale et physique. Le vent dans les herbes. La force des vagues et des marées. L’harmonie minérale des rochers. La quête et le questionnement de la liberté s’ouvrent aux éléments, loin du tumulte de la ville, de la technologie, de la performance et de la rentabilité modernes. Samir, Xavier, Liza, et le lunaire Pierrot (Thomas Chabrol) qu’ils croisent sur leur chemin, suivent le fil de leur propre pelote existentielle. Ils acceptent de le suivre en lâchant du leste. L’humour de dragueur bourlingueur de Xavier répond à la candeur bonhomme de Samir, face à l’instinct libertaire auquel Liza ouvre soudain les bras.

Lili Rose3

Bruno Ballouard a choisi de filmer des êtres qui ont déjà décidé de fuir un système de vie quadrillé, ou qui prennent la tangente pendant un week-end. Son récit fait aussi le choix d’une ligne qui privilégie la fuite et fait confiance aux pulsions, aux instincts, aux coups de cœur, aux accélérations, aux respirations. Il enchaîne des scènes construites comme des tableaux, des saynètes à humeur variable, en réaction à ce qui s’est joué juste avant. L’occasion pour l’auteur-réalisateur de distiller un ton très personnel, qui joue de la mélancolie comme du burlesque. Une note douce-amère jamais cynique et toujours bienveillante. Les personnages se regardent avec curiosité mais ne se toisent pas, hormis une frangine muselée par son frère lors d’un dîner qui dérape.
LILI ROSE - 5La finesse d’observation se mêle à un sens du cadre précis. La cocasserie des situations et des postures de Xavier et Pierrot gagne parfois l’espace pour un comique discret et décalé. Une tonalité juste que Bruno Ballouard infuse avec flair. Inspiré, il a réuni la trop rare Salomé Stévenin, sexy dans son élégance naturelle, opaque dans sa densité intérieure, Mehdi Dhebi, juvénile dans sa fluidité féline, mélancolique dans sa retenue solide, et Bruno Clairefond – une révélation-, déglingué dans son irréductibilité solitaire, touchant dans sa frondeur humaniste. Trois visages et trois corps offerts avec générosité au regard du spectateur.

 

Par Olivier Pélisson

Sortie : 8 octobre 2014 Affiche Mommy 3

Durée : 2h14
Un film canadien
Genre : Comédie dramatique
Réalisation : Xavier Dolan
Distribution : Anne Dorval, Antoine-Olivier Pilon, Suzanne Clément, Patrick Huard, Alexandre Goyette, Michèle Lituac, Viviane Pacal, Nathalie Hamel-Roy

La mère. Vaste figure que Xavier Dolan scrute, visite, fouille, depuis son premier long métrage J’AI TUE MA MÈRE. Un face-à-face implacable qui tenait de la partie de ping-pong existentiel vu par les yeux du fils. Avec MOMMY, il déplace le curseur et rejoint le regard de la génitrice. Une femme, seule, veuve, qui récupère un beau jour la garde de son fiston adolescent et copieusement agité. Trimballé d’un centre à un autre depuis la mort du père, cet hyperactif hyperémotif déborde d’amour pour sa p’tite maman. Et en déborde tellement que les situations et échanges virent à l’extrême en un quart de seconde.

Mommy 1Comment se renouveler avec ses obsessions ? Comment surprendre avec un sujet vieux comme le monde ? Comment saisir son auditoire ? C’est tout l’art de Xavier Dolan, auteur et réalisateur de ce cinquième film où il ne joue cette fois pas (comme dans LAURENCE ANYWAYS). Il a composé un ballet humain à trois personnages sans cesse au bord de la rupture. C’est là où il excelle, dans ce jeu avec les limites. Limites du relationnel entre les êtres, limites de l’acceptation entre les personnages, limite du supportable entre une mère et un fils, limites du vivable pour une femme en plein « burn out ». Et limites du cadre même de l’image sur l’écran.

Mommy 2Le cinéaste et son chef opérateur André Turpin offrent en effet au film et au spectateur le format carré, rare et dense du 1.25. Un choix qui concentre le regard encore plus fortement sur le visage de ces deux femmes et de ce garçon, solitudes aimantées les unes aux autres. Un parti-pris avec lequel ils jouent aussi lors de respirations éclatantes, qui ouvrent MOMMY à un nouvel horizon. Judicieux et pertinent comme rarement, car la forme épouse parfaitement le propos, au plus proche de l’enfermement qui guette chacun des protagonistes, au plus près des sensations du spectateur.

Créatif, foisonnant, précis, Dolan compose un univers visuel où le style claque. La palette des lumières balaie rapidement la froideur clinique initiale par un festival de couleurs chaudes, des éclats du soleil aux décors intérieurs. Outre le format marquant, le look adopté pour Diane, la mère, joue à fond la carte du voyant d’une « bimbo » mère de famille, et sert subtilement la coexistence de la fragilité et du feu dans ses veines. La voisine Kyla est plus rangée en apparence, mais sa flamboyance naît à fois de son visage tendu, de son bégaiement et de son rapport au monde. Quant à Steve, il agite sa blondeur et sa frondeur juvéniles face à elles, tout comme il jette son corps sur tous les murs de sa vie, jusqu’à faire bouger « ses » deux femmes sur du Céline Dion. Audace sonore qui décolle étonnamment, du cadre privé et fermé d’une cuisine jusqu’à la salle de cinéma qui lui fait face au moment de la projection. Mommy 3

Sculpteur méticuleux dans la construction de ses personnages, Xavier D s’est à nouveau entouré de trois interprètes qu’il a déjà conviés, avec générosité, de l’héroïne maternelle de J’AI TUÉ MA MÈRE (Anne Dorval) à la compagne de LAURENCE ANYWAYS (Suzanne Clément). Ces deux dernières et la révélation Antoine-Olivier Pilon (aperçu en ado dans LAURENCE…) trouvent en Diane, Kyla et Steve l’occasion « d’incarner » avec une force et une intensité stupéfiantes. Au-delà de l’exercice ostentatoire de la performance, ils élèvent des personnages créés sur papier, et dans la tête de leur auteur réalisateur, au statut de figures entêtantes. Le résultat est captivant et bouleversant, à la fois mûr et décapant. Du grand art.

Par France Hatron Sils 1

Sortie : 20 août 2014

Durée : 2h03 min

Un film français

Genre : Drame

Réalisateur : Olivier Assayas

Distribution : Juliette Binoche, Kristen Stewart, Chloë Grace Moretz…

 

Maria Enders, une comédienne mondialement connue et reconnue, se voit proposer de rejouer dans la  même pièce de théâtre qui l’a rendue célèbre à 18 ans. Mais elle n’interprètera plus le rôle de la jeune Sigrid, belle et ambitieuse. Place à celui d’Helena, une femme plus mûre, meurtrie par la vie. Son personnage va devoir donner la réplique à une star montante du cinéma grand public, adulée par les adolescents et les paparazzi. C’est le choc des générations et des cultures… Sils 2

Autant le scénario est intelligent et l’interprétation de Juliette Binoche et Kristen Stewart irréprochable, autant l’ennui nous gagne vite et s’installe. On cherche la magie et le rêve mais on reste collé au texte, incapable d’attendre autre chose que quelque chose ne se passe. Comme si les intentions premières du réalisateur avaient été inspirées par les planches plus que par la caméra. Dommage…

Sils 3