Par France Hatron
Sortie : 17 juillet 2013
Durée : 1h55
Genre : Thriller dramatique
Réalisation : Sean Ellis
Interprétation : Jake Macapagal, Althea Vega, John Arcilla…
Il ne fait pas bon vivre au bord des rizières, dans les montagnes du nord des Philippines. La vue panoramique est paradisiaque mais les récoltes de riz ne permettent plus à Oscar Ramirez et à sa famille de survivre. Cap sur Manille, rêve américain en tête, pour tenter de trouver du travail. Oscar se rend dès son arrivée dans une agence pour l’emploi où il est intercepté par un intermédiaire qui lui propose un logement sur le champ. C’est louche ! Le père de famille se déleste de toutes ses économies pour occuper un trou à rats. Mais la police locale se charge dans la foulée d’expulser les Ramirez pour les remplacer par une autre famille au motif qu’il s’agit d’un logement d’état ! La famille désespérée rejoint les bidonvilles. Il y a vraiment urgence à trouver un job car la fillette d’Oscar a une rage de dent. Oscar commence un emploi de manutentionnaire. En guise de salaire, il se verra offrir des sandwichs dans un sac en plastique. Ses illusions s’envolent.
De son côté, Mai se présente à un entretien dans un bar. Bien qu’enceinte avec deux enfants à charge, comme elle est très belle et pourvue d’une poitrine opulente, on se doute bien que Charlie la tenancière ne lui propose pas de faire le ménage ! Elle lui gardera même ses enfants pendant ses heures de travail ! Quand on aime, on ne compte pas : Charlie ira jusqu’à lui demander de lancer sa fille de 9 ans dans la profession !
Manille, cité impitoyable… adage démontré à chaque plan à la manière d’un documentaire qui veut raconter sans racoler ni émouvoir. Nous sommes aussi naïfs qu’Oscar pour le croire enfin tiré d’affaires lorsqu’il se voit proposer un poste de convoyeur de fonds dans la banlieue la plus dangereuse de la capitale. Pris dans l’engrenage de la violence, il ne peut plus reculer. C’était un homme droit, loyal, pacifique et aimant mais la réalité macabre de la pauvreté et de la corruption l’ont rattrapé et mis au pli, tout comme sa femme. Triste réalité : le déterminisme social officie en douce, rongeant les philippins sur des générations.
On a compris les intentions de l’auteur, louables : partir d’un cas particulier pour pointer du doigt la misère et la corruption dans un pays surpeuplé où l’on ne peut survivre qu’en édifiant sa propre loi, en devenant méchant quand on est né gentil. Mais le scénario décousu n’est pas à la hauteur des intentions, ni de la réalisation, ni de l’interprétation. Sean Ellis semble avoir imaginé plusieurs scénarios indépendants qu’il a associés sans vraiment les lier. Le montage saccadé n’a pas aidé à fluidifier le déroulé du scénario. De même, la psychologie du personnage de Mai n’est pas développée et la trame de sa triste histoire avance à petits pas sans trouver sa place aux côtés de l’intrigue principale des convoyeurs de fond.
Pourtant, grâce à quelques artifices efficaces, Sean Ellis sait faire monter l’intensité dramatique pour redonner du souffle à son scénario qui parfois s’épuise. Certaines scènes du prologue surprennent et déroutent même par leur originalité qui tient beaucoup plus de la mise en scène et de l’image travaillée avec brio que des rebondissements souvent attendus. Les comédiens, bien dirigés et inspirés par le contexte social ambiant – puisque ce sont des acteurs locaux – donnent le meilleur d’eux-même. Leurs dialogues eurent mérité plus de recherche et de profondeur. Dommage car on a forcément des choses à dire quand on sait qu’une vie entière ne suffira pas pour gagner sa liberté.