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Par Olivier Pélisson

Sortie : 8 octobre 2014 Affiche Mommy 3

Durée : 2h14
Un film canadien
Genre : Comédie dramatique
Réalisation : Xavier Dolan
Distribution : Anne Dorval, Antoine-Olivier Pilon, Suzanne Clément, Patrick Huard, Alexandre Goyette, Michèle Lituac, Viviane Pacal, Nathalie Hamel-Roy

La mère. Vaste figure que Xavier Dolan scrute, visite, fouille, depuis son premier long métrage J’AI TUE MA MÈRE. Un face-à-face implacable qui tenait de la partie de ping-pong existentiel vu par les yeux du fils. Avec MOMMY, il déplace le curseur et rejoint le regard de la génitrice. Une femme, seule, veuve, qui récupère un beau jour la garde de son fiston adolescent et copieusement agité. Trimballé d’un centre à un autre depuis la mort du père, cet hyperactif hyperémotif déborde d’amour pour sa p’tite maman. Et en déborde tellement que les situations et échanges virent à l’extrême en un quart de seconde.

Mommy 1Comment se renouveler avec ses obsessions ? Comment surprendre avec un sujet vieux comme le monde ? Comment saisir son auditoire ? C’est tout l’art de Xavier Dolan, auteur et réalisateur de ce cinquième film où il ne joue cette fois pas (comme dans LAURENCE ANYWAYS). Il a composé un ballet humain à trois personnages sans cesse au bord de la rupture. C’est là où il excelle, dans ce jeu avec les limites. Limites du relationnel entre les êtres, limites de l’acceptation entre les personnages, limite du supportable entre une mère et un fils, limites du vivable pour une femme en plein « burn out ». Et limites du cadre même de l’image sur l’écran.

Mommy 2Le cinéaste et son chef opérateur André Turpin offrent en effet au film et au spectateur le format carré, rare et dense du 1.25. Un choix qui concentre le regard encore plus fortement sur le visage de ces deux femmes et de ce garçon, solitudes aimantées les unes aux autres. Un parti-pris avec lequel ils jouent aussi lors de respirations éclatantes, qui ouvrent MOMMY à un nouvel horizon. Judicieux et pertinent comme rarement, car la forme épouse parfaitement le propos, au plus proche de l’enfermement qui guette chacun des protagonistes, au plus près des sensations du spectateur.

Créatif, foisonnant, précis, Dolan compose un univers visuel où le style claque. La palette des lumières balaie rapidement la froideur clinique initiale par un festival de couleurs chaudes, des éclats du soleil aux décors intérieurs. Outre le format marquant, le look adopté pour Diane, la mère, joue à fond la carte du voyant d’une « bimbo » mère de famille, et sert subtilement la coexistence de la fragilité et du feu dans ses veines. La voisine Kyla est plus rangée en apparence, mais sa flamboyance naît à fois de son visage tendu, de son bégaiement et de son rapport au monde. Quant à Steve, il agite sa blondeur et sa frondeur juvéniles face à elles, tout comme il jette son corps sur tous les murs de sa vie, jusqu’à faire bouger « ses » deux femmes sur du Céline Dion. Audace sonore qui décolle étonnamment, du cadre privé et fermé d’une cuisine jusqu’à la salle de cinéma qui lui fait face au moment de la projection. Mommy 3

Sculpteur méticuleux dans la construction de ses personnages, Xavier D s’est à nouveau entouré de trois interprètes qu’il a déjà conviés, avec générosité, de l’héroïne maternelle de J’AI TUÉ MA MÈRE (Anne Dorval) à la compagne de LAURENCE ANYWAYS (Suzanne Clément). Ces deux dernières et la révélation Antoine-Olivier Pilon (aperçu en ado dans LAURENCE…) trouvent en Diane, Kyla et Steve l’occasion « d’incarner » avec une force et une intensité stupéfiantes. Au-delà de l’exercice ostentatoire de la performance, ils élèvent des personnages créés sur papier, et dans la tête de leur auteur réalisateur, au statut de figures entêtantes. Le résultat est captivant et bouleversant, à la fois mûr et décapant. Du grand art.

Par France Hatron Sils 1

Sortie : 20 août 2014

Durée : 2h03 min

Un film français

Genre : Drame

Réalisateur : Olivier Assayas

Distribution : Juliette Binoche, Kristen Stewart, Chloë Grace Moretz…

 

Maria Enders, une comédienne mondialement connue et reconnue, se voit proposer de rejouer dans la  même pièce de théâtre qui l’a rendue célèbre à 18 ans. Mais elle n’interprètera plus le rôle de la jeune Sigrid, belle et ambitieuse. Place à celui d’Helena, une femme plus mûre, meurtrie par la vie. Son personnage va devoir donner la réplique à une star montante du cinéma grand public, adulée par les adolescents et les paparazzi. C’est le choc des générations et des cultures… Sils 2

Autant le scénario est intelligent et l’interprétation de Juliette Binoche et Kristen Stewart irréprochable, autant l’ennui nous gagne vite et s’installe. On cherche la magie et le rêve mais on reste collé au texte, incapable d’attendre autre chose que quelque chose ne se passe. Comme si les intentions premières du réalisateur avaient été inspirées par les planches plus que par la caméra. Dommage…

Sils 3

 

 

 

 

Par France Hatron 

Reaching affiche 2

 

Age : A partir de 15 ans

Sortie : 20 août 2014 

Durée : 1h44 

Un film brésilien

Genre : Drame romantique, biopic 

Réalisation :  Bruno Barreto 

Distribution : Gloria Pires, Miranda Otto, Tracy Middendorf, Marcello Airoldi… 

 

Central Park, 1951. Elisabeth Bishop lit son poème Un art à son ami poète Robert Lowell. Il n’est pas convaincu. En panne d’inspiration, la jeune femme rejoint le Brésil où l’accueille une ancienne amie, Mary, qui vit en couple avec Lota, une architecte renommée, fière et autoritaire. Le trio est installé dans la splendide demeure de Lota, nichée en pleine nature au dessus de Petropolis. Lota réalise qu’Elisabeth est alcoolique. Rien n’arrête son attirance pour elle. Elisabeth cède à ses avances. Mary ouvre les yeux sur la situation et part réfléchir à Rio. A son retour, Mary accepte la proposition de Lota de vivre à côté d’elle, d’élever l’enfant qu’elles adopteront et de s’accommoder de la présence d’Elisabeth.

Reaching for the moon 2Le bébé arrive sous l’œil triste et jaloux d’Elisabeth qui écrit beaucoup et boit du whisky sans fin. En 56, elle gagne le Pulitzer pour Nord Sud. Quand Carlos Lacerda, un ami écrivain de Lota, se porte candidat au poste de gouverneur de l’état de Rio, elle lui demande de construire un parc tel que Central Park, espérant ainsi combler Elisabeth. Des années durant Lota fait équipe avec Mary pour superviser la construction du parc Flamengo. Elisabeth, empêtrée dans son mal de vivre, regagne New York pour y enseigner pendant six mois. Elle apprend l’internement de Lota pour dépression. Dès lors, Mary fait tout pour casser la relation amoureuse de sa rivale…  Reaching for the moon 3

Pour son 18e long métrage, Bruno Barreto a adapté, en prenant quelques libertés, le best seller de la brésilienne Carmen L. Oliveira Rare and Commonplace Flowers : The Story of Elizabeth Bishop and Lota de Macedo Soares. Le film se concentre sur l’histoire amoureuse de ces deux femmes, éperdument libres pour l’époque, qui se sont nourries l’une de l’autre pour trouver leur inspiration. Chacune éprouvant des sentiments forts mais pas inconditionnels, elles n’ont rien pu lâcher de leur ambition. Elisabeth Bishop a sombré dans l’alcoolisme et Lota dans la dépression.

Reaching for the moon 4Toute l’histoire est articulée autour de la volonté de Lota de tout contrôler chez Elisabeth et Mary, sur le plan personnel et professionnel. On comprend cela quand Lota annonce : « Je veux tout ce que je peux avoir ».

De facture classique, le film regorge de ressorts dramatiques, temporisés par l’interprétation magistrale des deux actrices principales et par leur sensualité. Gloria Pires donne à Lota toute son incandescence et sa vitalité et Miranda Otto offre à Elisabeth une grâce dissimulée et une fragilité à fleur de peau que son talent ne parvient pas à estomper.

Reaching for the moon 5

 

 

 

 

 

 

Barreto dévoilant peu de repères dans le temps, on perd en concentration à force de deviner les époques. Une façon sans doute pour lui de rester libre par rapport à la chronologie de certains épisodes marquants de la vie de ses protagonistes. On pense par exemple au National Book Award que Bishop a reçu en 1970, soit quatre ou cinq ans après le moment choisi dans le film. De même, la mort de Lota ne fut en réalité pas aussi soudaine qu’à l’écran. Mais, peu importe les détails, la magie de la fiction fait son œuvre ici.

Par France Hatron Winter sleep

Sortie : 6 août 2014

Durée : 3h16

Genre : Drame

Un film turc

Réalisateur :

Nuri Bilge Ceylan

Avec : Haluk Bilginer, Melisa Sözen, Demet Akbag…

 

Aydin tient, avec un ami, un petit hôtel dans la steppe d’Anatolie centrale. Sa jeune et séduisante épouse, Nihal, vit aussi dans cet hôtel mais chacun dans son coin. Son amour pour le comédien, désormais retraité, s’en est allé. Aydin passe le plus clair de son temps à écrire des chroniques pour La voix de la steppe sur le manque d’esthétisme dans les villages anatoliens, ainsi que son livre qui le hante mais dont il ne voit pas le bout. Il s’agit de L’histoire du théâtre turc. Cet homme est cultivé, intelligent, sensible, mais aussi égoïste et très cynique. Ce que ne manquent pas de lui rappeler sa sœur Necla et sa femme. Le couple formé par Aydin et sa femme est en crise. La jeune femme veut exister en dehors de son mari en s’impliquant de plus en plus dans une association. Son époux, un peu jaloux, s’en plaint.

W 1Aydin est également propriétaire de plusieurs maisons accrochées aux rochers des alentours. Les locataires sont pauvres et, bien souvent, ne parviennent pas à payer leur loyer. La trame de l’histoire se construit à compter d’un incident à priori banal : un jeune garçon lance une pierre qui vient briser la vitre du 4 X 4 de Aydin et de son ami. On comprend que le petit répond aux représailles engagées contre ses parents débiteurs. Les huissiers ont sévi et le pauvre garçon n’a plus de télé.  Son père ivrogne, sorti fraichement de prison, a la rage au ventre et sa mère soumise n’a pas son mot à dire dans cette famille machiste et violente. Une famille qui, blessée dans son orgueil et son honneur, ne se relèvera pas. W3

Cette histoire universelle évoque la lutte des classes et montre la culture comme une arme d’émancipation et un vecteur de liberté. Un très beau film porté par des comédiens criants de vérité. Mais : spectateurs en mal de sommeil, s’abstenir car la ballade en Anatolie dure 3h16 !

Par France Hatron

 

Durée : 2h45

 

Un film dramatique américain

Réalisation :

Richard Linklater

Avec : Ellar Coltrane, Patricia Arquette, Ethan Hawke, Lorelei Linklater

Année :  2014

Boyhood affiche 2

Richard Linklater a réalisé l’expérience inédite de tourner son film pendant 12 ans, à raison d’une semaine par an, à Austin au Texas, avec les mêmes acteurs professionnels et enfants grandissant. Il raconte une histoire que tous ont découverte au fur et à mesure du tournage, à l’exception de la monteuse Sandra Adair qui connaissait le scénario.

De l’âge de 6 ans jusqu’à son départ à la Fac, Mason est le pilier central de cette histoire universelle, triste et belle, simple et ordinaire, et pourtant unique en son genre.
Boyhood 3 portraitsLes parents de Mason sont divorcés depuis toujours, semble-t-il. Samantha, sa sœur aînée – interprétée par Lorelei, la fille de Richard Linklater – et lui, n’ont pas vu leur père depuis longtemps. Quand il refait surface, ce n’est pas pour assurer ses responsabilités mais juste pour jouir de la vie avec ses enfants, les voir sourire, les entendre lui raconter leurs joies, leurs peines, dans le détail, comme si l’absence et le temps qui passe n’avaient pas d’incidence. Il les aime mais ne peut rien leur offrir de matériel, ni de durable. Ce qu’ils ont compris, leur mère aussi. Touchés par ce père et ex mari insouciant qui ne parvient pas à grandir ni à travailler, ils s’accommodent tant bien que mal du fardeau qui malgré tout les aident à traverser les épreuves de la vie.

Boyhood mère filsLe petit blondinet grandit sous nos yeux. Ses cheveux poussent, foncent avec l’âge, redeviennent court au gré de la mode et de l’autorité d’un beau père ivrogne. Il doit s’adapter sans cesse à une nouvelle vie, une nouvelle école, jongler avec ses blessures et celles des autres, se protéger pour ne pas sombrer. Sa mère, elle, se bat pour et contre tout, toujours digne et sans révolte apparente. Elle reprend ses études, se marie, divorce, déménage, reforme un couple… Les rides font leur nid, les kilos s’installent. Ainsi va la vie, une vie presque ordinaire chroniquée à la manière d’un genre nouveau qui se situe sur le fil, quelque part entre le documentaire et la fiction. Bohhood père fils

L’atmosphère mélancolique et optimiste à la fois porte les acteurs, particulièrement Patricia Arquette, Ethan Hawke et Ellar Coltran dont le jeu force l’admiration par sa justesse et sa cohérence au fil des années.

Le cinéaste parvient à sonder habilement l’intériorité de ses personnages dans les petits moments de la vie qui devraient passer inaperçus et dont il se sert, lui, pour dérouler son histoire sans grosses ficelles scénaristiques. L’émotion, tout en retenue, nous gagne au rythme des présidents de la république et des chansons de Coldplay, Bob Dylan, Cat Power… La vie passe mais l’envie de revoir défiler le film dans sa tête, elle, ne passe pas.

Boyhood frere soeur

Boyhood a été récompensé par l’Ours d’Argent du meilleur réalisateur au Festival de Berlin 2014. 

 


Par France Hatron

Palerme afficheAge : à partir de 15 ans

Sortie : 2 juillet 2014

Durée : 1h34

Une comédie dramatique italienne suisse française

Réalisateur : Emma Dante

Avec : Emma Dante, Alba Rohrwacher, Elena Cotta, Renato Malfatti, Dario Cassarolo… 

 

C’est l’été à Palerme. Rosa et Clara, la quarantaine, forment un couple en bout de course. Filmées de près dans une voiture brûlante, caméra à l’épaule, elles cherchent leur route pour aller célébrer le mariage d’une amie. Nous sommes des leurs dans cet espace confiné où la conductrice Rosa (Emma Dante), à l’allure d’une Emmanuelle Devos en colère, nous donne envie d’arriver vite à destination ! Rosa a fait sa vie à la capitale et déteste Palerme dont elle est originaire. Tous ses mauvais souvenirs d’enfance remontent à la surface, à l’image de la voiture qui lui fait front dans une ruelle étroite. Palerme 1

Samira, une vieille albanaise, conduit le véhicule adverse dans lequel les membres de la famille Calafiore, caricaturés à souhait, sont entassés. Ils s’agitent et s’impatientent dans l’habitacle avant de regagner leur demeure qui surplombe la voiture. Muette et blanchâtre, cette têtue de Samira refuse de reculer, comme si elle n’était pas assez usée par la vie ! Rosa non plus ne reculera pas car elle aussi est têtue. Une situation absurde poussée à son paroxysme qui ne se débloquera pas pendant la presque totalité du film.

Palerme 3

L’exercice périlleux s’avère pourtant concluant en partie. L’interprétation des deux femmes aussi folles l’une que l’autre, prêtent à s’affronter jusqu’à la mort, comme dans une tragédie grecque, force l’admiration. Mais osons l’avancer : on eut préféré un court métrage. Allez, avec un peu d’indulgence : un moyen métrage ! Certaines séquences redondantes avec les précédentes irritent et mettent les nerfs à vif. La psychologie des personnages secondaires, creuse, ne nous sort pas de l’enfermement des protagonistes trop communicatif.

Palerme 4On l’aura compris, la réalisatrice Emma Dante, aussi écrivain et dramaturge, a appliqué fidèlement la règle des trois unités du théâtre classique. Elle s’est concentrée sur la rue où elle a vécu pendant dix ans, la Via Castellana Bandiera, nom qu’elle a d’ailleurs donné au titre original de son film. Elle porte un regard très critique sur les comportements de la caste prolétaire sicilienne que représente la famille Calafiore. Paradoxalement, elle ne juge pas ses personnages individuellement, comme si, prisonniers de leur milieu et finalement pas responsables de leur folie, ils avaient une bonne raison d’être tous devenus fous.

By Olivier Pélisson

Photo JAUJA Created in 1978, the section Un Certain Regard reached its 37th edition during the 67th Cannes Film Festival. On the evidence of this selection it stays true to its founding aims: to discover and to show singular films that renew cinematic expression, as much by their aesthetic as by their themes.

Twenty features were presented this year, providing a vast open window on our world and its state of health. Works came from the five continents, Africa (Ivory Coast), Oceania (Australia), Asia (Israel, China, India, South Korea), America (USA, Argentina) and Europe (Spain, Italia, Greece, Hungary, Austria, Norway, UK, France). So from these offerings how is the world? It seems, well somewhat sick: Humanity is the victim of constant pressures…

An Aboriginal old man strongly resists restrictive laws in Charlie’s Country by Rolf de Heer. A Korean lesbian policewoman struggles against prejudices in A Girl at My Door (Dohee-ya) by July Jung. A Chinese family goes beyond itself to cure the father in Fantasia by Wang Chao. A young Spanish couple tries to survive through the economic crisis in Hermosa Juventud by Jaime Rosales, while the young Greek brothers are dreaming of better days in Xenia by Panos H. Koutras. Photo Party girl

Meanwhile a young girl has to keep the faith against indifferent parents in Incompresa by Asia Argento and a woman growing old wants to preserve her freedom at any cost in Party Girl by Marie Amachoukeli, Claire Burger & Samuel Theis. A Norwegian couple is troubled by the husband’s cowardice in Turist by Ruben Östlund. An English guy can’t escape his Mafia family and his fatal destiny in Snow in Paradise by Andrew Hulme.

There is only one step from pressure to nightmare and horror, such as the horror carried out by men in the pictures and the words of the photographer Sebastião Salgado in The Salt of the Earth by Wim Wenders & Juliano Ribeiro Salgado.

Photo Party girl 2Or there’s the horror of a terrifying vision of the night in Lost River by Ryan Gosling and the horror of dogs revolting against humans in White God (Fehér isten) by Kornél Mundruczo. The horror of a man controlled by tyranny can be found in Run by Philippe Lacôte and the horror of men ready to do their worst to get money in Titli by Kanu Behl. Horror confronts an ordinary man in the face of the murder of his wife in Blue Room (La Chambre bleue) by Mathieu Amalric while there is the horror of the loss of a child in The Disappearance of Eleanor Rigby by Ned Benson and in Jauja by Lisandro Alonso. A daughter experiences horror of being an incestuous slave of her father and of herself in That Lovely Girl by Keren Yedaya.

Hopefully, nightmare can turn into sweetness of dream and tale, like the final and oneiric chapter of the magnificent and powerful Jauja by Lisandro Alonso, in which a father rediscovers his daughter.

And finally, love still makes the world go round such as in Family Love, Xenia and Party Girl; possible love in Bird People by Pascale Ferran and difficult love in Titli. Love in danger infuses Turist and strong love in Hermosa Juventud or The Disappearance of Eleanor Rigby. Mad love forms the fabric of That Lovely Girl, Amour fou and Blue Room. BIRD_PEOPLE photo_CaroleBethuel

The powerful dream of better days for the planet has also come, thanks to The Salt of the Earth, where Sebastião Salgado explains his and his wife’s ecological wish to rebuild the place of his youth in Brazil. After seeing the worst as a photo-reporter, he wants to give birth again to a jungle where desert has grown. And it works! There is wide hope, and a positive energy transmitted by film.

The energy of youth was also present through the seven films shot by new directors, comprising one third of Un Certain Regard, a record among this year’s Cannes selections. The titles were: Party Girl, A Girl at My Door, Lost River, Run, Snow in Paradise, The Disappearance of Eleanor Rigby and Titli. Party Girl finally received the Caméra d’Or, rewarding the best first feature of all the Cannes sections. BIRD_PEOPLE photo7_Archipel 35 Photo Party girl 3

This human adventure, cleverly and intensely made my three young filmmakers, is a tough and moving portrait of a lady who desperately wants to go on driving her life as she wants. She goes out, drinking, dancing, cheating, laughing and enjoying every single day, and at the same time receives in return the love of her four children. The jury headed by actress and director Nicole Garcia chose well, and with this accolade provided continued proof that Un Certain Regard still stays as a true place for discovery.

Par Olivier Pélisson

 

LES CHÈVRES DE MA MÈRE ***
Age : Tous publics
Sortie : 16 avril 2014

Durée : 1h40

Un film français

Genre : Documentaire
Réalisation : Sophie Audier

Les chèvres de ma mère

Les chèvres 3

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LES TROIS SŒURS DU YUNNAN ***

Age : Tous publics
Sortie : 16 avril 2014

Durée : 2h28
Un film franco-chinois
Genre : Documentaire
Réalisation : Wang Bing

Les 3 soeurs 2

Les 3 soeurs

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le hasard des sorties de films allie la même semaine deux documentaires au parallélisme bienvenu. Le plateau des Gorges du Verdon sert de décor au premier, où une femme qui élève son troupeau et concocte son fromage de chèvre, seule, depuis quarante ans, se prépare à la retraite et marraine une jeune agricultrice à qui elle va transmettre bêtes et savoir-faire. Les montagnes de la province isolée du Yunnan, au Sud-ouest de la Chine, servent de décor au second, où trois petites filles et sœurs, élèvent moutons et cochons et enchaînent les tâches quotidiennes, pendant que leur père cherche du travail à la ville.

D’un côté, Sophie Audier, jeune réalisatrice française dont c’est le premier long métrage et à la riche expérience de scripte, qui lui a permis d’affiner un regard sur le monde auprès de Roman Polanski, Alain Gomis, Manoel de Oliveira, Abderrahmane Sissako, Mahamat-Saleh Haroun ou Otar Iosseliani. De l’autre, Wang Bing, cinéaste chinois aguerri et apprécié du public de cinéma d’auteur international depuis dix ans, à qui le Centre Pompidou à Paris rend hommage de mi-avril à fin mai, avec une rétrospective (A l’ouest des rails, Fengming, Le Fossé, etc.).

 

Tous deux filment une vie dépouillée, rudimentaire, tendue comme une ligne droite, au gré des exigences de chaque jour et du rythme de chaque saison. Une existence où la nature prime et régule tout, loin des contingences administratives et citadines. Un rapport au monde dominé par l’endurance, la régularité, l’adaptabilité, la rigueur, l’opiniâtreté. Une démonstration par l’image et le son qu’il est encore possible de vivre décalé des moules bureaucratiques, marchands et du vampirisme de la mondialisation.

Maguy, Yingying, Zhenzhen et Fenfen. Quatre femmes à l’opposé du chemin professionnel, l’une au seuil de la retraite, les autres à l’âge où elles devraient ne pas encore travailler. Et pourtant tout les unit. Leur lien profond et viscéral à la nature, aux éléments, à la lumière, aux saisons, qui dictent leurs faits et gestes. Leur courage et leur plénitude tranquilles, quand rien de leur quotidien ne cède à la facilité. Leur lien familial profond et pudique, avec une femme filmée par sa fille, qui a choisi de suivre une autre voie (Maguy est la mère de Sophie Audier), et trois enfants dont la mère est partie vivre ailleurs et que le père a confié aux grands-parents.

Ces récits sont simples et limpides. Maguy veut transmettre pour pouvoir partir en retraite soulagée et trouve en Anne-Sophie une jeune agricultrice réceptive. Yingying, Zhenzhen et Fenfen avancent sans réfléchir, avec pour seule exigence de manger à leur fin et de dormir en paix dans leur environnement ascétique. Sophie Audier s’est faite complice et discrète au milieu des deux bergères-agricultrices, pour saisir le nerf de leurs avancées. Wang Bing a gagné la confiance des fillettes pour les filmer et les suivre de la maison aux champs sans commentaire.

La sensation du spectateur est dense. Car ces deux récits racontent l’universel. Et l’idéal de vie. L’engagement, le désintéressement, la transmission, la bienveillance. Tout cela dans l’état naturel de plaines et montagnes belles et rudes à la fois. Ils donnent aussi à voir la coexistence de l’ancien et du nouveau, à une époque où la technologie et le zapping généralisé menacent en permanence la contemplation et l’étirement du temps. Tout cela sous l’œil de deux cinéastes qui ont pratiquement tout filmé et cadré eux-mêmes, pour protéger la conversation nécessaire entre ce qui regarde et ce qui est regardé.  les chèvres 5

Les 3 soeurs 3C’est là où le geste de filmer devient engagé et politique. Sophie Audier saisit un mode d’être en résistance, celui d’une femme fidèle à son activisme depuis quarante ans, face aux difficultés de sa cadette qui peine à recevoir les autorisations pour s’installer comme jeune agricultrice. Quant à Wang Bing, dont le cinéma n’est pas diffusé dans son propre pays, il capte une Chine individuelle à travers une histoire particulière, qui symbolise pourtant nombre de ses concitoyens, à l’ère où l’empire chinois impose sa marque et cache sa réalité humaine au monde.

 

 

Par France Hatron  Affiche Gazelle

 

Age : A partir de 10 ans 

Sortie : 26 mars

Durée : 1h52

Un film français

Auteur : Jean-François Pignon

Réalisateur : Jean-François Pignon

Avec : Jean-François Pignon et d’autres comédiens à l’identité non communiquée.

 

Jean-François a 12 ans quand son père, éleveur et dresseur de chevaux, lui offre une jument qu’il baptise Gazelle. Il vit avec son frère Cédric et ses parents dans une grande ferme perchée sur la montagne.

Jean-François apprivoise sa nouvelle amie et découvre son monde emprunt de silence et de sensibilité. Quelques années plus tard, Cédric possède lui aussi un cheval. Alors que les deux frères participent à un spectacle hippique, Jean-François se fait repérer par l’organisateur du salon du cheval d’Avignon. Il accepte sa proposition mais n’emmène pas son frère dans l’aventure ! Il propose néanmoins à une jeune admiratrice, Isabelle, de devenir sa palefrenière. Elle le suit et l’épouse.

Gazelle6Jean-François se prend d’amitié pour un vendeur de vans intriguant qui lui parle de Dieu et d’amour. Coups de poignard à répétition pour l’artiste : Cédric lui pique un contrat important et son numéro de « Cromagnon » qui l’a rendu célèbre, puis Gazelle tombe gravement malade. Son ami croyant lui propose alors de prier pour la sauver. Deux jours plus tard, elle est sur pied. Un miracle, selon le vétérinaire ! Jean-François achète la Bible et commence sa conversion. Mais ses rapports avec sa femme se dégradent. Il la retrouve une nuit dans son lit avec un ami commun et décide de divorcer. Peu de temps après, il épouse Sylvie, perdue de vue depuis longtemps, dont il aura deux filles. L’aînée se verra transmettre l’amour de cet univers hippique magique.

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Le héros de ce long métrage autobiographique est aussi le scénariste, le réalisateur, le comédien et le producteur ! Tout ça pour un seul homme, ça fait beaucoup et ça fait même beaucoup trop !

Jean-François Pignon a voulu raconter son histoire émouvante, celle du petit dresseur anonyme des montagnes devenu l’un des plus grands dresseurs de chevaux au monde. Une idée louable certes, mais quand on sait déléguer. Le scénario, pas écrit, manque de cohérence, d’esprit, et tout simplement d’intérêt. On apprend par exemple que Jean-François et Isabelle se sont mariés lorsqu’ils s’apprêtent à divorcer ! On cherche désespérément un semblant de dramaturgie et quand elle pointe son nez, elle retombe aussi vite, laissant le sentiment que l’auteur n’avait pas d’intentions précises. Les dialogues d’une rare pauvreté sont redondants par rapport aux images. Ils nous plongent dans l’ennui ou nous font rire – involontairement – aux éclats. Et comme les comédiens jouent très mal, difficile de chercher un seul responsable ! Pour saupoudrer le tout : la musique règne en actrice principale.

Gazelle 3Jean-François Pignon évoque la foi, puis sa propre foi, mais dit n’appartenir à aucune religion. Difficile à croire. Quant à son désir permanent de vouloir pardonner à tout le monde, il finit par agacer. Les bons sentiments alourdissent l’histoire d’une naïveté dont elle se serait passée.

Pourtant, d’un point de vue esthétique et technique, ce film trouve toute sa place de par ses beaux travelling et un son parfait. Coup de chapeau donc aux chefs opérateurs qui ont su mettre en lumière les scènes de dressage, de promenade dans la montagne ou sur les bords de mer en Camargue.

Dépourvue d’intensité dramatique, l’histoire ne témoigne certainement pas à sa juste valeur de l’aventure humaine et spirituelle de Jean-François Pignon. Dommage !

La cour de Babel

Par Olivier Pélisson

 

Age : Tous publics
Sortie : 12 mars 2014

Durée : 1h29
Un film français
Genre : Documentaire

Réalisation :

Julie Bertuccelli

 

10e arrondissement de Paris. Un collège au milieu d’immeubles près du Canal Saint-Martin. Une classe d’accueil où sont rassemblés des élèves tous juste arrivés de leurs pays, et qu’une enseignante familiarise et perfectionne à la langue française. Ils sont vingt-quatre, et ont entre onze et quinze ans. Ils viennent de Pologne, Tunisie, Mali, Croatie, Chili, Roumanie, Maroc, Biélorussie, Guinée, Brésil, Angleterre, Irlande du Nord, Serbie, Lybie, Venezuela, Côte-d’Ivoire, Etats-Unis, Sri Lanka, Ukraine, Mauritanie et Chine.

Réunis pour une année scolaire, ils attendent d’intégrer une classe de filière classique et de trouver leur voie en France. Pendant une heure et demie, le documentaire les accompagne et suit des présentations, discussions, confrontations, confessions et moments d’émotions avec leur prof Brigitte Cervoni. Un concentré de singularités et d’altérité. Où tous écoutent l’expérience de l’autre en commençant par apprendre à dire bonjour dans sa langue.

La cour de Babel.jpg-q_x-xxyxxJulie Bertuccelli ne filme que dans le cadre de l’école. Aucune intrusion dans l’espace privé. Tous les plans sont situés à l’intérieur de l’établissement et autour du programme pédagogique, comme pour le déplacement au Festival Ciné-Clap du film scolaire de Chartres. Ce parti-pris renforce l’intensité du propos et donne tout son poids à cette cour singulière, car l’enjeu reste concentré sur ce lieu d’éducation, d’apprentissage, où l’individu se construit au milieu du collectif. Et où l’étranger est accueilli avec sa différence.

L’intime pénètre l’école avec les visages et les corps de ces êtres en transition. Des êtres qui s’expriment avec spontanéité et parfois difficulté, tant les mots sont durs à trouver ou à assumer, et qui se font traducteurs quand leurs proches viennent rencontrer l’enseignante et que la compréhension manque. Des pans d’histoires familiales surgissent alors derrière les bureaux scolaires.

Cette transition tant géographique qu’existentielle touche fortement. C’est elle qui a attiré la cinéaste. Ces préados arrivent tous d’un ailleurs plus ou moins lointain et sont confrontés à des nouveaux repères comme à l’apprentissage de la vie, eux qui sont en train de passer de l’enfance à l’âge adulte. Envie de sécurité, pour ceux qui sont menacés dans leur propre pays. Envie de liberté, pour ceux qui y sont muselés. Envie de foyer retrouvé, pour ceux qui étaient séparés de leurs proches.

La-cour-de-Babel A

La caméra capte aussi la spontanéité et les tâtonnements de cette France en devenir. Une « cour de Babel », reflet d’un monde où il faut résister et persévérer pour se faire sa place. Le niveau de français n’est pas le même chez tous, la capacité d’apprentissage et de progression non plus. Mais tous doivent réagir et bougent de leur place initiale et de leurs croyances et certitudes. Le spectateur aussi, qui apprend à connaître et à accueillir ces enfants qui sont le terreau d’un avenir proche.

Julie Bertuccelli, dont l’humanisme romanesque faisait mouche avec ses deux longs métrages de fiction Depuis qu’Otar est parti… et L’Arbre, confirme que son regard reste perçant et bienveillant. En douceur et sans pensum, elle affirme aussi via son art, et via une mise en scène au plus près des visages, que vivre ensemble est toujours possible, et que la mixité n’est que richesse.