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Par Dominique Martinez Howard 1 

 

 

Sortie :  le 29 avril

A partir de 15 ans

Durée : 1h46 

Un documentaire français 

Réalisation :

Olivier Azam & Daniel Mermet

 

 

« Tant que les lapins n’ont pas d’historiens, l’histoire sera racontée par les chasseurs. Les chasseurs racontent des histoires de victoire (…) Mais l’histoire que préfèrent raconter les chasseurs, c’est pas d’histoire du tout (…) En écrivant une histoire populaire des Etats-Unis, Howard Zinn a pris le parti des lapins, le parti de ceux qui sont à l’autre bout du fusil ». Le postulat de départ de la trilogie d’Olivier Azam et Daniel Mermet donne le ton. Il s’ouvre par un premier volet passionnant intitulé Dupain et des roses, en hommage aux manifestations des ouvrières du textile de Lawrence (Massachusettes) de 1912. Le récit sera celui des perdants. Celui des esclaves, des Indiens, des déserteurs, des ouvriers, des ouvrières, des syndicalistes,… de tous ceux qui dans l’ombre de l’histoire officielle bataillent pour changer leur condition d’exploités. Lutte des classes versus impérialisme.

Howard livre 2Comme l’indique le titre, le documentaire repose autant sur la vie d’Howard Zinn que sur son œuvre d’historien et surtout son livre – Une histoire populaire des États-Unis de 1492 à nos jours (Ed. Agone, 2002). Son expérience personnelle façonne le regard qu’il porte sur l’histoire du 20ème siècle. Ce n’est pas un hasard si Zinn est né dans une famille ouvrière d’émigrés juifs d’Europe de l’Est, au début du siècle. La réalité de la grande dépression, celle du travail d’ouvrier portuaire, puis le traumatisme de la seconde guerre mondiale – notamment son rôle dans le bombardement de Royan – le marqueront profondément. La Bande Dessinée, Une histoire populaire de l’empire américain*, impressionnante par sa maîtrise visuelle et son envergure historique, mêle également ces deux histoires. Howard 3

C’est tout l’intérêt du film : au delà de la force du propos et de la rareté de nombreux documents d’archives, c’est une vision humaniste assumée qui se déploie. Les interventions de Zinn, celles du linguiste Noam Chomsky et de l’écrivain Chris Hedges, ponctuent le récit pédagogique de la voix off familière de Daniel Mermet. Et confirment l’importance de ce beau film militant qui vient combler des vides importants de l’histoire officielle américaine.

 

* Une histoire populaire de l’empire américain, de Howard Zinn et Mike Konopacki, Ed. Vertige Graphic, 2009, 263 p. 

 

NINGEN AffichePar France Hatron

 

Sortie : le 2 avril 2015 

Durée : 1h44

Un film turc, japonais, français 

Genre :

Drame fantastique 

Réalisation :

Çağla Zencirci et Guillaume Giovanetti 

Avec :

Masahiro Yoshino, Megumi Ayukawa, Xiao Mu Lee…

 

Dans une forêt sombre, une voix off narre le conte japonais d’un pari d’argent : « Le renard et le raton laveur ». 

A Tokyo, le PDG Mr Yoshino fait faillite. Son meilleur ami Lee, patron d’un bar, le console. Ils vont voir des filles, se saoulent. Cet épisode marque le début d’une dépression profonde. De son côté, Mme Wajima ouvre une lettre à son attention, provenant du service de Cancérologie de l’hôpital de Tokyo puis la déchire. Le tourbillon de la vie ne va décidément plus dans le bon sens. Son mari dévasté est sur le point de sauter par la fenêtre quand elle le rattrape in extremis. Elle le fait interner.

Ningen - Image 2 HDYoshino s’éprend alors d’une pensionnaire, Mme Ayukawa, avec laquelle il regarde les montagnes depuis le toit de l’asile. Mme Ayukawa lui dit qu’elle veut rejoindre son bien-aimé dans « le monde du dessous ». Yoshino rencontre deux autres patientes qui écrivent un conte sur un raton laveur et un renard, une histoire qui lui rappelle la sienne. Mme Ayukawa disparaît mais elle a laissé un message sur le toit.

 

Ningen - Image 1 HD

Structuré en trois parties – L’homme riche, Le raton laveur et Le renard -, le scénario à la fois trop complexe et naïf, mêle l’histoire d’un parcours initiatique vers la mort et la résurrection, à la légende du renard et du raton laveur. D’une première partie réaliste et ponctuée d’humour qui dépeint très bien le monde de l’entreprise au Japon et la déchéance d’un couple, on passe subitement à un monde imaginaire, hermétique et emprunt d’ésotérisme. Les nombreuses références au conte philosophique perturbent le récit et nous éloignent petit à petit du personnage principal, un PDG de Tokyo, pourtant fort attachant au départ. Quand son équilibre mental, perturbé par la faillite de son entreprise, le conduit jusqu’à la luxure, Yoshino bascule dans une dépression profonde qui développe son imagination. On perd alors pied avec lui mais on s’ennuie plus que lui ! Quand l’homme abattu se retire dans la forêt pour retrouver son amour perdu, qu’il tombe et reste coincé dans le piège du raton laveur, la naïveté touche à son paroxysme !

Ningen - Image 7 HDCette histoire d’amour et de sacrifice, somme toute très morale, réclame un esprit contemplatif exacerbé que, nous européens, avons peut-être du mal à solliciter quand l’émotion fait défaut. Et c’est le cas ici. Intention louable que de vouloir montrer la dépression de l’intérieur et la faire se transformer en un voyage initiatique en quête de l’amour perdu… Mais le scénario ambitieux, la mise en scène parfaite et l’interprétation très juste ne suffisent pas à nous embarquer dans le monde merveilleux des animaux de la forêt, des temples et des grands maîtres nippons en un coup de baguette psychiatrique.

 

 

 

Par France Hatron Photo retour1

 

Sortie : le 4 mars 2015

A partir de 15 ans

Durée : 1h29 

Un film italo-cambodgien

Genre : Drame

Réalisation : Llaria Borrelli et Guido Freddi 

Distribution : Llaria Borrelli, Philippe Caroit, Setha Moniroth… 

 

Photo Retour 2Cambodge. L’expropriateur, Xavier Lagrange, fait écraser une grand-mère et sa cabane, sous les yeux de ses petits-enfants, Srey et Kiri. La femme de Xavier, Mia – une parisienne photographe – le rejoint au Cambodge et le surprend dans un bordel entre les mains d’une fillette : Srey. Son petit monde bien rangé s’effondre brusquement. Elle achète de la cocaïne pour son usage personnel et l’on devine que ce n’est pas la première fois.

Photo retour 4Le proxénète d’enfants, Sanan, qui règne en maître sur le bordel par la terreur, propose à Mia d’acheter Srey pour 5000 dollars. Mia, ne parvenant pas à rassembler la somme, accepte de se prostituer pour solder sa dette. Puis, dans une voiture volée, elle prend la fuite avec Srey. Le road movie dramatique a plus que commencé quand Mia découvre, dans le coffre, deux autres fillettes échappées du bordel : Malin et Daa. Les quatre nanas ne sont pas au bout de leur peine…

 

Photo retour5Avec ce second long métragecoréalisé avec son mari Guido Freddi – Llaria Borrelli, s’offre son premier rôle en incarnant ici le personnage principal, Mia. Le film rend compte de l’exploitation sexuelle des enfants au Cambodge et de la fréquente complicité de leurs parents. Ces enfants, plus ils sont jeunes – une fois drogués et remis aux mains des proxénètes – mieux ils sont vendus et souvent même revendus au prix fort.

 

photo retour 6Les intentions de la réalisatrice sont claires : dénoncer cette exploitation, en choyant l’image. Pari tenu pour la dénonciation de ce fléau de société et pour les indéniables qualités artistiques de ce film. Mais il souffre hélas d’un scénario mal maîtrisé et d’une lenteur qui s’installe au premier tiers du film et ne nous lâche plus. Ce qui ne facilite pas l’accès à l’émotion. L’interminable promenade en forêt ennuie à mourir et prend le pas sur l’histoire. Et puis, le mélange des genres entre le documentaire fiction dans la première demi heure et le road movie dans l’heure qui suit se fait sans finesse. Ajoutées à cela : l’interprétation de Llaria Borrelli, inégale et sans nuances, etla musique quasi omniprésente pour nous plonger dans le bain de l’angoisse ou de l’espoir. Les dialogues creux ne pimentent pas le tout, ni la voix off lancinante de Mia essayant de nous faire croire que sa conception de la vie évolue au fil de son voyage initiatique. Mais on n’y croit pas ! Ne restent de ce film que la douceur et la douleur de ces enfants « otages » et leur espoir qu’un jour leur vie change. D’ailleurs, quand elles jouent entre elles, les petites malheureuses évoquent leurs futurs maris !

 

Par France Hatron 

Sortie : le 28 janvier 2015

A partir de 15 ans 

Photo 2 tempsDurée : 1h25

Un film franco-canadien 

Genre : Drame

Réalisation : Christophe Cousin

Distribution : Zacharie Chasseriaud, Antoine L’Ecuyer, Aure Atika…

 

Après le décès de son père, Victor et sa mère ont quitté la France pour le Québec. En s’aventurant sur le toit de son lycée, Victor aperçoit un adolescent prêt à sauter dans le vide. Il pose alors la main sur son épaule. Surpris, le jeune entame sa chute meurtrière. Victor récupère le baladeur MP3 du défunt François, et prend la fuite. Viennent ensuite le début d’un flirt avec une jeune fille du lycée et l’interrogatoire de la police. Après Victor, c’est au tour d’un ami du défunt de témoigner.

Photo 2 temps 3Victor se sent mal dans sa peau. Il reproche à sa mère de travailler de nuit et d’avoir quitté la France où elle avait un « bon boulot » et lui « des potes ». Lors d’une ballade nocturne au bord d’une rivière à fort courant, Victor parvient à sauver Samuel tombé à l’eau. Le jour de l’enterrement de François, Victor avoue à la mère du défunt sa présence sur le toit lors du drame…

Photo 2 temps 4

Ce premier film se saisit d’entrée de jeu des préoccupations d’un adolescent presque lambda qui a perdu son père. On sent la violence qu’il a en lui lorsqu’il confie à sa psy : «  j’aimerais bien être torero ». Une façon de reprendre les rennes de sa vie en extirpant ses blessures par la violence. Mais la psy le replace dans la réalité du monde adulte : «Bon… Quelque chose de réaliste ». A partir de là, son parcours n’aura rien d’un rêve. Le suicide de son camarade sous ses yeux le replonge dans le deuil déjà lourdement éprouvé par le départ de son père. Victor passe son temps à errer, tripoter son portable, le plus souvent sans mot dire. Il cherche à établir un lien moins superficiel avec sa mère mais qui s’avère aussi stérile que les dialogues du film sont creux. L’ambiance dramatique néanmoins bien rendue – rehaussée par l’atypique format carré du film – ne réussit pas à nous faire oublier le scénario peu structuré qui nous promène d’une intention à l’autre, avec hésitation, sans grande émotion, et nous plonge souvent dans l’ennui. On cherche des liens entre les séquences qui, filmées dans le désordre, n’auraient pas changé grand-chose au déroulé de l’histoire. Quant à la direction d’acteurs, bien épurée, elle n’avantage pas les comédiens. Les thèmes de la première relation amoureuse, du désir de l’autre, des pulsions suicidaires, de la responsabilité des images et des actes, de même que celle du deuil partagé et de la culpabilité sont certes évoqués mais quasi avortés.

Photo 2 temps3

Quand Victor découvre dans le portable de François une vidéo d’un jeune (supposé être François) respirant dans un sac en plastic, on ne sait pas si le personnage est victime ou consentant, s’il pratique un jeu, s’il a décidé de mourir asphyxié devant un témoin qui filme. Ou bien s’il est contraint de respirer dans le sac jusqu’à peut-être perdre la vie. Cette scène s’avère étrange et dérangeante. A cause de cette totale liberté donnée pour appréhender des thèmes aussi préoccupants que l’appel à mourir et le passage à l’acte, souffle comme un vent de malaise sur toute cette histoire.

 

Photo 2 temps 2

 

Par France Hatron Ceci est mon corps

Sortie : le 10 décembre 2014

A partir de 15 ans

Durée : 1h34

Une comédie française

Réalisation :  Jérôme Soubeyrand

Distribution : Jérôme Soubeyrand, Marina Tomé, Christophe Alévêque, Laetitia Lopez, Hervé Dubourjal, Julie Nicolet, Pierre-Loup Rajot et Hervé Blanc

Et avec la participation amicale de : Michel Serres, Michel Onfray et Bruno Clavier 

Un prêtre nommé Gabin rencontre Marlène, une actrice délurée, drôle et touchante lors d’une thérapie de groupe. Il en tombe amoureux et décide de la retrouver à Paris. Il se présente à son domicile – une maison –  sans prévenir et s’impose par une présence de plus en plus encombrante. Il découvre la vie en communauté, sans foi ni loi, légère à souhait. Ses appréhensions du départ se transforment petit à petit en curiosité puis en plaisir de chaque instant. Parallèlement au déroulé de l’histoire, s’ajoutent les témoignages des philosophes Michel Serres et Michel Onfray sur la question de la séparation du corps et de l’esprit dans le christianisme, abordée dans les épîtres de Saint Paul. On assiste également à une séance de psychanalyse transgénérationnelle avec Bruno Clavier qui porte un secret de famille pas banal !

Ce film est très bien écrit. Ses dialogues pertinents et drôles, déclamés par des comédiens toujours justes nous régalent du début à la fin.

 

 

Par Olivier Pélisson praiadofuturo_aff_400x533.indd

 

Sortie : 3 décembre 2014

Durée : 1h47
Un film germano-brésilien
Genre : Mélodrame
Réalisation : Karim Aïnouz
Distribution : Wagner Moura, Clemens Schick, Jesuita Barbosa, Savio Ygor Ramos

 

Praia do futuro (« plage de l’avenir »). Fortaleza. Etat du Ceará. Nordeste. Brésil. C’est dans cette grande ville côtière et isolée du pays que Donato et Konrad croisent leur route. Le premier, le Brésilien, est maître-nageur. Mécanicien de motos à Berlin, le second, l’Allemand, traverse l’Amérique du sud en bécane avec son meilleur ami, qui meurt noyé, emporté par les vagues brésiliennes. Les regards et les corps parlent, et les deux hommes tombent instantanément dans les bras l’un de l’autre. Le chaud et le froid, le tropical et le continental, l’ici et l’ailleurs, la confrontation fait des étincelles. Mais les mots sont rares. Car ces deux héros des temps modernes sont taiseux. Ils se donnent avant tout à leurs pulsions. Et Donato suit Konrad avec évidence vers l’Allemagne, laissant les siens, dont son petit frère, Ayrton, qui a tant besoin de son aîné…

C016_C001_0927UCKarim Aïnouz filme inlassablement la dualité de l’être humain, jusqu’à la dichotomie intérieure, qui pousse les personnages à agir, à bouger, à partir, à larguer les amarres, pour un jour ou pour une vie. Madame Satã, Le Ciel de Suely, Viajo porque preciso, volto porque te amo, O Abismo prateado, autant de trajectoires bouleversées qu’il suit avec acuité et bienveillance, sans aucun jugement moral. Les deux premiers sont sortis en France, les deux suivants non, malgré leur présentation à Venise (Viajo) et Cannes (O Abismo). Cet éternel balancement existentiel et cette dualité trouvent leur source dans le trajet même du cinéaste, né à Fortaleza au Brésil, et résidant actuel à Berlin, et ce cinquième long résulte de la réunion de ses deux pays, de ses deux terres, de ses deux mondes.

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Au pays des taiseux, le corps est roi. Aïnouz et son scénariste Felipe Brangança font pleinement surgir les personnages par leur déplacement, leur mouvement, et le réalisateur filme avant tout des corps dans l’espace et dans le cadre de sa caméra. Il excelle à inscrire la peau comme paysage projeté dans l’espace architectural des villes et dans l’immensité de la nature, de la chaleur « nordestine » de l’Océan Atlantique à la froideur de la Mer du Nord. Une peau qui domine dans cette peinture du désir, de l’amour, et du « saudade » incessant de ce qui a été et qui n’est plus. Les corps courent, plongent, sautent, nagent, roulent, frappent et fendent la vitesse. Mais le tempo n’est pas à l’engloutissement vorace du temps. Plutôt au déroulement alangui des choses.

Photo Paia 2Le réalisateur brésilien reste un adepte de la sensation plutôt que de la psychologie, de l’expérience plutôt que de l’explication. Il utilise l’ellipse pour passer d’un pays à l’autre, d’un moment à un autre. Seuls comptes les rencontres, les croisements, les retrouvailles. Tout comme il construit ses cadres avec l’œil précis de l’étudiant en architecture qu’il a été et du plasticien qu’il est. Et ça marche. Car, transcendé par son esthétique stylisée et son parti-pris sensoriel, Praia do futuro transpire du désir intense et mélancolique de ses personnages, de leurs manques et de leurs élans. Les éléments, les saisons révèlent et accompagnent l’état intérieur des êtres, pour lesquels le Brésilien Wagner Moura et l’Allemand Clemens Schick réussissent ensemble à incarner l’amour imprévu et improbable, au-delà des océans, au-delà de la raison. C005_C010_0919AN

 

Par France Hatron Marie Heurtin

Sortie : le 12 novembre

Durée : 1h35 min

Un film français

Réalisation : Jean-Pierre Ameris

Distribution : Isabelle Carré, Ariana Rivoire

 

Par France Hatron Mary 1

 

Sortie : 12 novembre 2014 

Durée : 2h00 min

Un film franco-suisse

Genre : Biopic, Drame, Romance

Réalisation : Thomas Imbach

Distribution :

Camille Rutherford, Sean Biggerstaff, Aneurin Barnard, Edward Hogg, Mehdi Dehbi… 

 

En 1587, la reine d’Ecosse Mary Stuart s’apprête à mourir. En voix off : la lecture de sa dernière lettre à sa cousine Elizabeth, reine d’Angleterre. En flash back, Mary vient au monde, est couronnée reine d’Ecosse, apprend à marcher avec distinction. Mary 4Sans sa mère, elle embarque, à 5 ans, pour la France où elle est éduquée à la Cour. A 15 ans, elle épouse François de France et devient également reine de France lorsque son époux accède au trône deux ans plus tard. Quand ce dernier se voit emporter par la maladie, la jeune veuve rejoint l’Ecosse dévastée par la guerre. Au même moment, sa cousine Elisabeth est sacrée reine d’Angleterre.

May 2Mary se remarie à 22 ans avec son cousin Lord Darnley, un meneur du parti catholique qui se montre très vite vaniteux et désireux de jouir de son titre de roi. Jaloux de la complicité qu’entretient sa femme avec son secrétaire particulier Rizzio, Darnley supprime le supposé amant. C’est la fin du mariage royal. Mary donne pourtant naissance à un héritier : Jacques Ier d’Angleterre ou Jacques VI d’Ecosse. Mais elle réalise que l’amour de sa vie est le Comte Bothwell, un protestant rencontré sur le navire qui l’a ramenée de France. Elle tombe enceinte de lui et l’épouse après avoir fait tuer son mari. Rejetée par l’aristocratie et le peuple écossais, horrifiés par son geste et sa passion amoureuse, Mary demande de l’aide à sa cousine Elisabeth qui la fait emprisonner et finalement décapiter 19 ans plus tard.

Mary 3

Inspiré de l’œuvre Marie Stuart de Stefan Sweig, ce film aux artifices théâtraux dévoile la face privée de l’intrigante reine d’Ecosse, qui fut à la fois une martyre et une meurtrière. La trame de ce biopic psychologique dramatique est centrée sur l’adoration que voue Mary à sa cousine, la reine Elizabeth qu’elle qualifie de « sœur » mais aussi de « rivale et d’ennemie mortelle ». Dans sa correspondance qui rythme le film, elle lui dévoile ses secrets et angoisses. Toute sa vie, elle attendra d’elle : amour, reconnaissance et compassion.  Un parti pris certes intéressant mais qui imposait de contextualiser l’histoire dans l’Histoire. Le meilleur conseil donc avant de voir ce film : connaître la vie de Marie Stuart pour en comprendre et en apprécier tous les revers déroulés dans ce scénario confus. N’apparaissent pas les repères de dates, ni la scène de couronnement de la reine bébé, ni celle de son deuxième mariage. Pas de plan non plus sur Elizabeth. Autant d’ellipses qui empêchent de bien situer l’héroïne romantique – insoumise, séductrice, parfois frivole, libre d’aimer qui elle veut, prête à tout pour que Protestants et Catholiques vivent en paix – dans son époque et sa fonction.

Henri 2bisA souligner néanmoins : la beauté de l’image en général et particulièrement celle des plans de l’infortunée Mary. Son interprète, Camille Rutherford possède le minois, le port de tête et la grâce adéquates pour incarner cette figure atypique. Mais son allocution théâtrale, lente, la laisse un peu en marge de son jeu. Les tourments de la reine sont en revanche bien rendus sur les paysages embrumés, austères, portés par une musique dissonante macabre. Une scène forte retient aussi l’attention : celle des canards restés pour seuls compagnons de Mary dans la cour du château lorsque sonne son déclin. Le pari ambitieux de Thomas Imbach de ne dresser qu’un portrait psychologique en s’éloignant du traditionnel film historique n’est, vous l’aurez compris, que partiellement tenu.

 

Mary 6

 

 

Par France Hatron Affiche une nouvelle amie

 

Sortie :

5 novembre 2014 

Durée : 1h48 min

Un film français

Genre :

Comédie dramatique

Réalisation :

François Ozon

Distribution :

Romain Duris, Anaïs Demoustier…

 

 

 

 

Deux amies très proches rencontrent leur futur mari presque en même temps et  l’épousent presque simultanément.  L’effet miroir s’arrête là… Laura et David ont une fille, Lucie, qui ne verra pas sa mère grandir puisqu’elle meurt d’une grave maladie peu de temps après son accouchement. Aux obsèques Claire – devenue la marraine de Lucie – prononce un discours d’adieu à son amie chère. Elle lui promet de veiller sur David et Lucie.

Amie 1Pour surmonter le choc et l’absence de sa moitié tant aimée, David se travestit en femme avec ses vêtements, espérant ainsi calmer sa fille. Il lui donnera désormais le biberon, en perruque et maquillé. Il faut dire que « Se retrouver seul avec un enfant à élever, c’est trop dur ». Le ton est donné… La métamorphose exprimant un désir qui remonte à son enfance,  elle n’aura rien d’éphémère. Au début Claire ne comprend pas son ami. Elle préfère d’ailleurs cacher à son mari l’énorme secret qui la lie à David. Mais, petit à petit elle accepte son nouvel ami il est, le défend, fait du shopping « entre femmes », et lui trouve même un nouveau prénom : Virginia.

Amie 2

De son côté, Claire se métamorphose autant que David. Elle devient plus féminine et vraiment libre, apprivoisant une personnalité plus proche de son identité profonde. Son personnage est finalement aussi central que celui de David. Chacun à sa manière, tâtonne et change de vie en se réinventant.

Leur relation légère et grave à la fois, touche intrigue et dérange. Notre malaise s’installe. Ozon ne cesse de brouiller les pistes, nous laisse croire à des coups de théâtre qui n’arrivent pas, surprend sans clichés. Il raconte une histoire pas banale sans juger. Il aime profondément ses personnages et il a beau pousser loin, très loin ses acteurs, ils s’en sortent miraculeusement bien.

Amie 3On retiendra « la » scène inoubliable du film qui résume à la perfection les tourments et la beauté intérieure de Claire et David : celle de leur soirée dans un night club ringard où un travesti interprète Une femme avec toi de Nicole Croisille. David se retrouve dans cet homme transformé et il en pleure, mais pas de joie. Claire est, elle, chamboulée par le spectacle mais aussi éblouie. Son regard en dit long sur la métamorphose de tout son être. Elle a réellement pris conscience de ce qu’est devenu son ami et s’en accommode au bout du compte mieux que lui. Ni son éducation, ni son engagement marital ne freineront plus ses sentiments.

Amie 5

Avec Une nouvelle amie, Ozon confirme qu’il aime les femmes et qu’il adore les mettre en danger. Il nous a habitués, dans la plupart de ses films (Jeune & Jolie, Potiche, Le Refuge, Swimming Pool…) à jouer avec leurs sentiments et leurs limites sans jamais les soumettre à qui que ce soit parce qu’il les aime libres. Il renouvelle ici l’expérience et ose une fois de plus outrepasser les codes du « bien pensant ». Son audace atteint là son apothéose.

 

 

Par Olivier Pélisson Lili Rose1

 

Sortie : 22 octobre 2014 

Durée : 1h30

Un film français

Genre : Road movie

Réalisation :

Bruno Ballouard

Distribution :

Salomé Stévenin, Mehdi Dehbi, Bruno Clairefond, Thomas Chabrol, Catherine Jacob 

 

Une fille. Deux garçons. Un trio imprévu qui prend la route sur un coup de tête. On a déjà vu ça sur grand écran. Et pourtant… LILI ROSE réussit à créer de l’inédit et à installer un ton, une musique, dans un premier long métrage tout en douceur.

Samir bosse comme ouvrier. Xavier vit de coups au poker. Un soir, ils rencontrent Liza, la future femme d’un pote du second qui les a invités à sa fête. Promise à une vie rangée, mais déçue par son mec en pleine soirée, elle part errer dans les rues et les deux amis la récupèrent. Commence une virée improvisée qui se prolonge en une parenthèse enchantée. Le temps de prendre le large, au bord de la mer, justement. Ailleurs que dans l’espace balisé par leur quotidien. Histoire de fuir les questions. Ou de les questionner en creux. Qu’a-t-on fait de sa vie ? S’est-on engagé sur la bonne voie ? Avec la bonne personne ? Est-on à la bonne place ? A trente, quarante ou cinquante ans, les personnages jouent leur destin à leur manière.

LILI ROSE - 7Les paysages de la côte bretonne ajoutent à cette ouverture mentale et physique. Le vent dans les herbes. La force des vagues et des marées. L’harmonie minérale des rochers. La quête et le questionnement de la liberté s’ouvrent aux éléments, loin du tumulte de la ville, de la technologie, de la performance et de la rentabilité modernes. Samir, Xavier, Liza, et le lunaire Pierrot (Thomas Chabrol) qu’ils croisent sur leur chemin, suivent le fil de leur propre pelote existentielle. Ils acceptent de le suivre en lâchant du leste. L’humour de dragueur bourlingueur de Xavier répond à la candeur bonhomme de Samir, face à l’instinct libertaire auquel Liza ouvre soudain les bras.

Lili Rose3

Bruno Ballouard a choisi de filmer des êtres qui ont déjà décidé de fuir un système de vie quadrillé, ou qui prennent la tangente pendant un week-end. Son récit fait aussi le choix d’une ligne qui privilégie la fuite et fait confiance aux pulsions, aux instincts, aux coups de cœur, aux accélérations, aux respirations. Il enchaîne des scènes construites comme des tableaux, des saynètes à humeur variable, en réaction à ce qui s’est joué juste avant. L’occasion pour l’auteur-réalisateur de distiller un ton très personnel, qui joue de la mélancolie comme du burlesque. Une note douce-amère jamais cynique et toujours bienveillante. Les personnages se regardent avec curiosité mais ne se toisent pas, hormis une frangine muselée par son frère lors d’un dîner qui dérape.
LILI ROSE - 5La finesse d’observation se mêle à un sens du cadre précis. La cocasserie des situations et des postures de Xavier et Pierrot gagne parfois l’espace pour un comique discret et décalé. Une tonalité juste que Bruno Ballouard infuse avec flair. Inspiré, il a réuni la trop rare Salomé Stévenin, sexy dans son élégance naturelle, opaque dans sa densité intérieure, Mehdi Dhebi, juvénile dans sa fluidité féline, mélancolique dans sa retenue solide, et Bruno Clairefond – une révélation-, déglingué dans son irréductibilité solitaire, touchant dans sa frondeur humaniste. Trois visages et trois corps offerts avec générosité au regard du spectateur.