Par France Hatron
Sortie : le 13 janvier 2016
Genre : Drame romantique
Age : à partir de 15 ans
Réalisation : Todd Haynes
Distribution : Cate Blanchett, Rooney Mara, Kyle Chandler, Sarah Paulson…
La première scène s’impose d’emblée comme l’épilogue. Deux femmes dinent dans un grand restaurant. La jolie blonde, élégante et sulfureuse, filmée de face dégage une sensualité qui donne le « la ». En face d’elle, vue de dos, une autre femme, brune, qui semble mal à l’aise. Une voix d’homme l’interpelle. Surprise, elle se retourne, perturbée, l’air angoissé. Les deux protagonistes se séparent, contrariée pour la brune, résignée pour la blonde. On réalise qu’il y a eu un avant…
Retour donc quelques années avant dans le New York des années 50, à l’approche de Noël. Thérèse Belivet, une jeune femme ordinaire presque jeune fille, issue de la classe moyenne et à l’expression triste qui attire l’attention, travaille dans le grand magasin Frankenberg. Elle vend des jouets. Un jour d’affluence au magasin, son regard se pose sur une femme plus âgée qu’elle, la jolie blonde, chique et pleine d’assurance découverte au début du film. Cette femme, en bonne mère de famille cherche un cadeau de Noël pour sa fille Rindy qui a 4 ans. L’alchimie opère et à partir de là, Thérèse ne lâchera plus l’affaire. Son petit ami Richard aimerait l’épouser mais ce n’est pas sa préoccupation du moment. Elle n’a d’yeux que pour Carol et pour la photo, son autre passion.
Les deux femmes vont s’aimer dans l’Amérique redoutable des années 50 où la clause de moralité fait loi. Carol va devoir se battre pour rester libre tout en continuant à voir sa fille, mais pour la protéger aussi. Le film avance à la lenteur des sentiments de ces deux amoureuses qui vivent chaque instant avec une délicatesse extrême. Les gestes de Carol, emprunts de féminité et de sensualité anesthésient le spectateur presque autant que l’amoureuse transie. La pudeur l’emporte ici sur la démonstration, comme pour mieux témoigner de cet interdit majeur de l’époque que représentait l’homosexualité.
Cate Blanchett excelle dans ce rôle et tout particulièrement dans la scène magistrale devant le juge, celle où elle joue l’avenir de sa vie de famille et par là-même celui de sa fille. Mais on regrette que l’émotion décuplée dans cette séquence ne se retrouve pas vraiment dans le reste du film. Quant à Rooney Mara, tout en retenue et en détermination, elle étonne par son physique de jeune fille en fleurs et ne convainc pas toujours en amoureuse soumise. Quoi qu’il en soit, le film dégage une élégance de tous les instants, tant dans sa mise en scène que dans ses dialogues et sa musique.