Par Dominique Martinez
Sortie : le 11 novembre 2015
Durée : 2h14
Réalisation : Robert Guédigian
Distribution : Simon Abkarian, Ariane Ascaride, Grégoire Leprince-Ringuet…
A travers Une histoire de fou, Robert Guédiguian apporte sa pierre à l’édifice de la reconnaissance du génocide arménien. Et prolonge la réflexion humaniste de toute son œuvre.
Il aura fallu dix ans après Le Voyage en Arménie en 2006 où Ariane Ascaride incarne une médecin française qui découvre ses racines arméniennes en partant à la recherche de son vieux père malade pour que Robert Guédiguian aborde de front la question politique de son identité arménienne. Sa volonté didactique transparait dans son récit mais le film présente plusieurs atouts.
Il s’inspire d’une histoire vraie et incroyable. La Bombe est un récit autobiographique de José Gurriaran, un jeune journaliste espagnol qui en 1981, à Madrid, saute sur une bombe posée par des militants de l’Armée secrète arménienne de libération de l’Arménie, l’ASALA. A moitié paralysé, sa vie bascule à plus d’un titre : il ne sait rien de l’Arménie, mais va s’y intéresser pour tenter de comprendre et même rencontrer ses bourreaux pour finalement adhérer à leur cause. C’est cette histoire qui est transposée au cœur de la fiction et de l’attentat qui, en 1971, fit sauter la voiture de l’ambassadeur de Turquie et blessa gravement un jeune cycliste…
Pour aborder le génocide en tant que fait historique, Guédiguian refuse la reconstitution et s’en remet à l’originalité d’un prologue en noir et blanc, dans un tribunal : au cours de son procès, Soghomon Tehlirian, dont la famille a été entièrement exterminée, raconte comment en 1921, il a exécuté en pleine rue, à Berlin, Talaat Pacha, principal responsable du génocide arménien. C’est le témoignage du premier génocide du 20ème siècle. Il sera acquitté par un jury populaire.
A travers cette fresque historique, Guédiguian couvre les trois quarts du 20ème siècke et quatre générations de diaspora arménienne. Ses personnages sont incarnés et les scènes de tournées à Beyrouth montrent toute la légitimité et les limites de la lutte armée. Car c’est bien la question posée : la violence est-elle justifiable pour se faire entendre, aussi juste soit la cause défendue ?