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Par France Hatron

Age : à partir de 12 ans

Film français

Sortie : 15 juin 2011 

Genre : Comédie, Romance

Durée : 1 h 39  

Réalisation : Katia Lewkowicz

Interprétation : Benjamin Biolay, Emmanuelle Devos, Nicole Garcia, Valérie Donzelli, Sarah Adler, Hanna Laslo, Eric Lartigau, Nadir Legrand, Jean-Noël Cnockaert, Rodolphe Dana

Trois jours avant son mariage, Arnaud, 35 ans, voit disparaître sa fiancée qui, paraît-il, compte bien revenir le jour « J ». Est-il surpris, abattu, indifférent, on ne sait pas très bien… Car il va vite combler l’absence de sa brune, que l’on ne connaît pas encore, par la présence d’une blonde plutôt jolie et attachante. Il a une sœur aimante et pleine d’humour, une mère bourgeoise castratrice qui brasse beaucoup d’air pour rien.

Comique de situation : surgit la belle famille étrangère (qui ne parle pas un mot de français !) en vue de préparer le mariage. Sans la mariée, c’est tellement plus drôle ! Et pour une immersion garantie totale, les dialogues ne sont pas traduits. <

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Le futur marié se débat entre ses sentiments naissants pour une fille qui n’a pas sa place dans son nouveau projet de vie et la machine infernale du mariage, enclenchée à vive allure par une belle famille que rien n’arrête. Ni la disparition de Mademoiselle, ni la moue de Monsieur et son détachement total pour les artifices aussi superflus que kitchs de la noce.

Katia Lewkowicz a réussit, pour son premier long-métrage, un beau mélange des genres entre comédie chorale hilarante et mélo sentimental. On échappe aux personnages naïfs et pitoyables, aux bons et aux méchants pour pénétrer dans un univers où l’on ne plaint ni admire personne. On se délecte devant les protagonistes victimes de leurs états d’âme changeants, confrontés somme toute à des situations assez banales. Ils sont très critiques vis-à-vis d’eux même. En témoignent leurs surnoms et les sonneries ridicules de leur téléphone qui les font rire autant que nous !

La réalisatrice contourne les ficelles faciles des genres, ne joue pas de rebondissement caricaturaux et surprend par des situations et réactions insolites. Les dialogues, en revanche manquent parfois de recherche. On se serait bien passé des « putains » à foison dans la première partie du film ! Même dans la bouche du séduisant Benjamin, ce n’est pas très digeste !

Tous aussi talentueux les uns que les autres, les acteurs forment une joyeuse pléiade. Benjamin Biolay incarne son personnage avec une grande justesse, montrant une personnalité à la fois secrète, grave, profonde et pleine d’humour. Il intériorise ses doutes pour ne laisser percer, tour à tour, que détachement, passivité, agressivité, sentiments retenus et émotions contenues.

En sœur aimante et structurée, Emmanuelle Devos, lui donne des répliques pertinentes sur mesure. Sa grâce irradie l’écran et sa palette d’émotions dévoile une belle alchimie entre rigidité et ouverture d’esprit, sérieux et humour malgré elle. Nicole Garcia, en mère histérique de ces deux jeunes bourgeois gâtés, est tout aussi convaincante et dôle. Quant à la belle et sensuelle Valérie Donzelli qui campe la future mariée fantôme, complètement désinvolte, irresponsable mais ingénue, elle décape ! La jeune prodige, Sarah Adler, lui vole presque la vedette en lui alpaguant son « futur » !

De beaux portraits qui dessinent notre époque avec précision et fantaisie, en sondant les blessures et les doutes avec beaucoup de discernement.

Pourquoi tu pleures ? était présenté à Cannes en 2011, à l’occasion de la clôture de La semaine de la Critique. 

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Par France Hatron

Age : à partir de 15 ans

Film japonais

Sortie : 4 mai 2011 

Genre : Drame

Durée : 2 h 15  

Réalisation :  Tran Anh Hung 

Interprétation : Kenichi Matsuyama, Rinko Likuchi, Kiko Mizuhara

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La Ballade de l’impossible est un roman d’Haruki Murakami, très fidèlement adapté par Tran Anh Hung. Son titre original Norvegian Wood vient d'une chanson des Beatles qui évoque les amours défuntes laissant des traces indélébiles au coeur et à l'âme.

A la fin des années 60, Kizuki, le meilleur ami de

Watanabe, se suicide à Kobe. Les deux jeunes hommes formaient un trio inséparable avec Naoko, la petite amie de Kizuki. Watanabe quitte alors Kobe et part s'installer à Tokyo où il commence ses études universitaires. Quand il retrouve Naoko, chacune de leur vie bascule. La jeune femme fragile et sensible ne s'est pas remise de la mort de Kizuki. Elle fait l'amour avec Watanabe le jour de ses 20 ans, puis disparaît dans la nature. Watanabe ne l'oublie pas. Sa vie entière est hantée par le souvenir de cette femme qu'il aime, son premier amour qui va d'ailleurs le détruire à petit feu. 

On reconnaît particulièrement la patte du cinéaste des films cultes L'odeur de la papaye verte et A la verticale de l'été, à son travail sur l'image et les couleurs. Chaque plan, qu'il s'agisse de plans d'ensemble ou serrés, de gros plans sur les visages, est transcendé par le regard contemplatif de la caméra.  

Les longs plans fixes – sur des décors intérieurs ou sur des paysages montagneux ou autres- magnifiquement cadrés, laissent imaginer des tableaux de maîtres que la lumière infiltrée avec virtuosité s'évertue à rendre sans pareil. La pureté et la beauté des visages qui ont déjà perdu toute l'innocence de l'enfance nous touche dès les premières séquences. La sensualité des images et des corps, mêlée à la pudeur et à la naïveté  des personnages dégagent une grande poésie et une émotion constantes. Les bruits de l'eau, la guitare comme le violon nous plongent dans une atmosphère de bien être et de paix qui vient contraster avec la noirceur des propos : celle de la maladie d'amour, de l'amour sans sexe, et du deuil insurmontable.

Un drame psychologique mélancolique où les jeunes protagonistes, au seuil de leur vie d'adulte, ont déjà fait toutes les expériences de l'amour, la passion, la mort, la séparation, la dépression, le deuil, la souffrance, la fuite, la folie… Tran Anh Hung aborde toutes ces secousses de l'existence avec une précision et une délicatesse rares. Il va très loin dans ses démontrations. Les douleurs des personnages se font nôtres longtemps parce qu'elles nous font réfléchir en profondeur.

La ballade de l'impossible était en Compétition Officielle à La Mostra de Venise 2010.

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Par France Hatron

Age : à partir de 15 ans

Film français

Sortie :  4 mai 2011

Genre :  Comédie dramatique

Durée :  1 h 31

Réalisation :  Patrice Leconte

Scénario : Patrice Leconte

Interprétation :  Pauline Lefèvre, Nicolas Giraud, Clément Sibony

L'histoire est simple : deux frè

res jeunes et beaux décident de rendre visite à leur mère à Saint-Jean-de-Luz. Mais c'était sans compter la présence, à leurs côtés, d'une blonde insouciante et sensuelle, qu'ils allaient devoir se coltiner et même se partager ! Ce road movie très léger aurait pu afficher quelques allures de Jules et Jim s'il était mieux écrit, avec des dialogues subtiles qui aient de l'esprit et un peu de profondeur. Or, ils sonnent creux et s'avèrent souvent redondants.

Les comédiens, eux, empruntent le jeu de Rohmer pour un rendu finalement sans saveur car on ne perçoit pas leurs motivations, ni leur naïveté, ni leur raison d'être ou de vivre. Leur psychologie nous échappe totalement.  Qu'ils soient posés dans leur camping-car, sur le sable, dans des cabines d'essayage ou dans un cimetière, rien ne les anime vraiment. La fille s'agite, séduit (elle le fait bien !) sans se poser aucune question, ce qui détend mais ennuie aussi beaucoup ! D'ailleurs, elle pourrait bien faire n'importe quoi, ses deux admirateurs resteraient toujours aussi insipides ! Seule la musique parvient à nous émouvoir un peu.

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Interview

  

 du réalisateur Florian Gallenberger   

et de la comédienne Anne Consigny   

   

Propos recueillis par France Hatron pour RFI, le 13 avril 2011   

   

Florian Gallengerger, votre film débute sur des images de votre héro John Rabe. On le voit saluer les salariés de l’entreprise Siemens qu’il dirige à Nankin. Parlez-nous de cette première séquence qui plante l’un des décors majeurs du film : l’usine.  

Florian Gallenberger : Dans cette première séquence, il marche dans la cour et nous constatons que tous les travailleurs chinois s’inclinent devant lui. Nous voyons aussi à quel point l’usine Siemens était importante en Chine en 1937. Parce que la plupart des gens ne réalisent pas qu’au début du  XXème siècle, Siemens et beaucoup d’entreprises européennes essayaient d’intégrer le marché chinois, de la manière qu’elles essaient de le faire aujourd’hui. En ce sens, Rabe était un colonialiste, un défenseur de l’économie moderne. Nous voulions montrer qu’il était un colonialiste devant lequel ses travailleurs devaient s’incliner et se conduire comme des serviteurs. Et en même temps il fallait montrer qu’il avait construit quelque chose d’assez conséquent. Il a vraiment beaucoup œuvré à Nankin. Il fut à l'origine de la construction de centrales électriques et de l’installation du réseau téléphonique. C’est pourquoi j’ai voulu montrer dans la première séquence que c’était quelqu’un plein de bonnes intentions mais qui paradoxalement affichait une attitude assez méprisable. Parce qu’il regarde les Chinois comme des sous hommes.  

 Comment est née cette idée de scénario ?  

 FG : Le scénario est inspiré du journal de John Rabe. C’est un de nos producteurs qui a acheté les droits du journal quelques années avant que je commence à travailler sur le film. Il m’a donné un coup de fil un jour et m’a demandé : « Voulez-vous réaliser un film sur John Rabe ? » Je lui ai dit : « je ne sais pas. Qui est cette personne ? Je n’en ai jamais entendu parler. » Parce que Rabe était totalement inconnu en Allemagne. L’idée pour le scénario fut évidemment de rester le plus proche possible du journal. Parce que le journal ne contient pas une histoire,  mais seulement des faits qui servent à élaborer la dramaturgie d’une histoire au sein de laquelle vous pouvez imaginer un film avec un début, un milieu et une fin qui donnent un résumé précis de ce qui s’est passé à Nankin.  

 Parlez-nous de ce journal de John Rabe. Il est resté caché, je crois, plusieurs années… A quel moment a-t-il été rendu public ?   

FG : Son journal lui a été confisqué en Allemagne lorsqu’il est rentré de Nanjin. Il a été arrêté par la Gestapo car on lui a reproché d’avoir collaboré avec les Chinois contre les Japonais. Les Japonais étaient des alliés des Allemands à cette époque. Les Allemands ont donc récupéré le journal et l’ont fait disparaître après la guerre. Le journal n’a été retrouvé que dans les années 90 par Iris Chang qui était en train d’écrire un livre sur le massacre de Nanjin. Elle a découvert ce journal en Allemagne et c’est grâce à elle que les gens ont à nouveau entendu parler de John Rabe. Ce journal est l’un des rares documents existant sur le massacre de Nanjin. Son contenu vous donne une idée très précise de ce qui a provoqué le massacre. Rabe a raconté sa vie dans son journal de façon précise. Vous pouvez donc y piocher beaucoup d’informations sur ce qui s’est passé.        

Quelle est la part de fiction dans ce scénario inspiré du réel ?   

FG : Comme je vous l’ai dit, quand vous disposez d’un journal, vous devez changer certains détails dans le but d’obtenir  une histoire réelle. Voici un exemple : dans le film, il y a ce moment où vous pensez que la femme de Rabe’est morte dans le bombardement du bateau. En réalité, il ne s’agissait pas d’un bateau mais d’un train. Elle voyageait dans un train qui a été bombardé. Mais nous n’avons  pas pu filmer cela car nous n’avons pas  pu obtenir de train à ce moment là. Nous avons donc combiné les deux idées. Nous combinons parfois des évènements réels, en modifiant un peu la chronologie, en changeant quelques détails. Mais je pense que tout ce que vous voyez dans le film est presque arrivé ou aurait vraiment pu arriver de cette façon.  

John Rabe était membre du parti nazi. Parlez-nous de sa vraie personnalité que vous montrez assez ambivalente dans le film. Sur quels documents d’archives vous êtes-vous appuyé pour étoffer sa psychologie ?   

FG : Je crois que si j’avais connu Rabe, je ne l’aurais pas aimé. Oui, il était arrogant, sûr de lui. Nous pensions qu’il était très drôle mais il ne l’était pas pour être honnête. Vous savez, je voulais créer ce type de colonialiste qui dans sa profondeur intérieure a le sens des responsabilités, le sens du devoir, le sens des responsabilités pour ses travailleurs chinois. Je pense que cette pression lui a permis de faire ressortir ce qu’il gardait enfoui en lui auparavant. Je voulais  montrer qu’une personne conf

rontée à des évènements difficiles pouvait voir grandir en elle des qualités insoupçonnées : la bienveillance, le courage et des qualités dont elle se sentait dépourvue.     

Vos personnages principaux ont des personnalités très affirmées. C’est le cas notamment d’Anne Consigny qui incarne le rôle de Valérie Duprès, la directrice de l’Université de filles de Nankin. Pourquoi avoir choisi une comédienne française pour ce rôle ?  

FG : J’ai intérêt à faire attention à ce que je dis car elle est juste à côté de moi (rires). La vraie  directrice du collège de filles de Nanjin était en fait américaine mais nous n’avons pas pu trouver la comédienne qui convenait à cette personnalité. Nous avons donc changé le personnage initial contre un personnage français. Bien sûr, nous connaissions des actrices françaises, mais pas suffisamment pour éviter tout le processus du casting.  Je me souviens avoir regardé des films français les uns après les autres pendant des semaines et des mois, à la recherche de l’actrice française parfaite pour le rôle. A la fin, il nous restait une short liste de trois ou quatre noms. J’ai donc parlé avec Nicolas Traube, le coproducteur français, de quelques unes des actrices retenues et au final Anne est sortie du lot. Mais vous ne connaîtrez pas les finalistes de la short liste !  

Anne Consigny, votre personnage, Valérie Duprés, va suggérer de créer une zone de sécurité à Nankin. C’est elle qui va également nommer John Rabe dirigeant de cette zone, contre l’aval de son mari. Quelles motivations, selon vous, incitèrent cette femme à prendre des décisions d’une telle importance ?  

Anne Consigny : Je ne sais pas si dans la vie réelle, c’est elle qui a eu l’idée de la zone de sécurité.  Je pense qu’elle avait un penchant amoureux pour John Rabe. Elle avait beaucoup d’admiration pour lui. Son amour venait de son admiration pour lui. Elle, elle avait pour motivation première d’aider les jeunes filles les plus démunies dans le monde. Parce qu’elle était orpheline de maman et vécut dans une ferme aux Etats-Unis, seule avec son père et ses frères et sœurs. Et malgré cette situation, elle avait atteint les études supérieures et avait eu comme une vocation presque religieuse d’aller aider les petites filles qui auraient le plus besoin d’elle. Elle a choisi la Chine vraiment sciemment. Donc sa motivation de créer la zone de sécurité et de demander à John Rabe d’être Président, vient de cette pulsion à faire le bien. C’est une juste parmi les justes, en Chine.  

Florian Gallenberger, vous avez choisi d’alterner la fiction et des images d’archives. Pourquoi ?  

FG : Parce que nous ne pouvions pas montrer, en fiction, Nanjin aussi détruite que nous le voulions, car la Chine est si moderne maintenant que vous ne pouvez plus trouver de rues anciennes ni de vielles maisons. Dans une scène, vous distinguez des collégiennes sur des images d’archives en noir et blanc et vous réalisez qu’elles ont exactement le même uniforme que dans notre film. Je pense que les archives en noir et blanc fonctionnent très bien avec la partie fiction du film.  

Certaines images du film sont très violentes. On pense à ces gros plans sur les têtes des chinois décapités, aux corps défunts des soldats, de deux médecins et de trois infirmières. Ces séquences sont-elles des symboles parlants de l’atrocité du massacre de Nankin ?    

FG : Si vous faîtes un film sur un massacre, vous devez en montrer certains, vous savez. Je pense que sa dimension est l’une de ses principales caractéristiques. En effet, la réalité était bien plus violente. Il y a eu des milliers et des milliers de femmes violées. Des débats sur le nombre exact de morts ont toujours lieu mais tellement de têtes ont été coupées. Cette scène dans laquelle deux officiers japonais font le concours de celui qui pourra décapiter le plus de têtes possible…  il faut savoir qu'elle est vraiment arrivée. Je ne suis pas un fan de films violents, pas du tout, mais je pense que dans ce cas, la violence fait partie intégrante de l’histoire. Et si vous regardez bien ces moments de violence, il n’y en a pas qui soient là juste pour exprimer la violence. Elle est toujours perçue au travers des yeux des personnages. C’est le cas de Rabe qui assiste à la décapitation de son chauffeur. Toute la violence a un rapport direct avec les personnages.    

Est-ce que vous avez eu un problème de conscience en tant qu’Allemand avant de décider de faire ce film sur cet Allemand, somme toute membre du parti nazi ?  

FG : Oui, c’était bien sûr une question importante dont nous avons parlé. Je me suis posé ce problème de conscience de savoir si je pouvais ou non faire un film sur un nazi, membre du parti. Et je pense que la raison pour laquelle j’ai consenti à le faire et même à me dire que c’était bien de le faire est due au fait que John Rabe, après être rentré en Allemagne, a lui-même souffert du traitement infligé par les nazi. Il a perdu son travail. Il fut gardé prisonnier par la Gestapo, etc… Donc il a lui-même été victime des nazis, ce qui change ma perception que j’ai de lui. Il n’a jamais eu de retour sur ce qu’il avait fait, vous savez, il n’a pas compté dans le 3ème Reich, parce qu’on ne l’aimait plus. Et après la guerre, il est redevenu personne et mourut dans l’indifférence. Donc, je pense que cela donne une dimension tragique à sa vie, ce qui fait de cette histoire, selon moi, une histoire dont on peut parler. Et par-dessus tout, la question est : était-il un nazi ou n’était-il pas un nazi ? Qu'est-ce qui détermine le fait d'être un nazi ? Est-ce votre appartenance au parti ou vos actes ? Et je pense que ce qui est intéressant est le fait qu’il soit membre du parti nazi alors qu’il ne se comporte pas du tout en tant que tel. Et en ce sens, je dirais que les actes et les comportements raisonnent plus que les mots. Et je pense que 70 ans plus tard, on peut faire des films sur des gens qui ne sont ni blancs ni noirs, ni bons ni mauvais, mais quelque part entre les 2. Et c’est ce qu’il est, c’est comme ça que je le vois. C’est pourquoi j’ai aimé raconté son histoire.  

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Par France Hatron le sentiment de la chair

Film français

Sortie : 29 décembre 2010

Genre : Drame

Durée : 1 h 31

Réalisation : Roberto Garzelli

Scénario : Roberto Garzelli

Interprétation : Annabelle Hettmann, Thibault Vinçon, Claudia Tagbo, Pascal Nzonzi, Emmanuel Salinger, Pierre Moure.

 

La caméra se déplace au ras d’un corps féminin couché sur le dos et touché du bout des doigts par une main – masculine, peut-on supposer - qui semble réaliser un diagnostic médical avec délicatesse et inspiration. Il ne s’agit de toute évidence pas d’un massage de kinésithérapeute. Puis, cette même main inscrit au marqueur des points sur ce même corps. On n’en saura pas plus pour l’instant…  La seconde scène se passe dans un bloc opératoire. Elle est tout autant dépourvue de dialogues et de musique que le premier plan. On se croirait presque dans un reportage à l’esthétique visuelle perfectionnée.

Le scénario se profile juste après, lorsque Héléna, une étudiante en dessin anatomique, se souciant d’une douleur dans le ventre, attend son diagnostic dans le service de Radiologie de l’hôpital où elle effectue son stage. Un médecin charmant, qui enseigne aussi l’anatomie à la Fac, interprète ses résultats et la rassure. Il lui confie avoir remarqué un petit détail atypique de son anatomie : une côte en plus !

le sentiment de la chair 4Nul doute que ces deux belles créatures vont aller plus loin dans le domaine de la connaissance ! Leur passion commune pour l’anatomie et leur attirance physique mutuelle les fait plonger tout d’abord dans une histoire d’amour fusionnelle, très charnelle mais somme toute assez banale. La caméra filme les protagonistes au plus près, ne laissant rien à l’imagination. Cet érotisme, jamais dénué de sensualité, est rendu ni grâce à une émotion fabriquée, ni à une intensité dramatique artificielle. Roberto Garzelli, réalisateur français d’origine italienne, a choisi de filmer ces corps enchaînés de façon naturaliste. On n’entend pas parler de sentiments dans Le sentiment de la chair, on les devine. le sentiment de la chair 2

Très vite, le désir d’Héléna et de Benoït, et leur plaisir partagé intensément ne les comblent plus. Il leur faut explorer plus loin les secrets de leur corps. Ils ne sont pas fous et pourtant, ils se laissent emporter par ce désir d’absolu en matière de connaissance de leur intimité profonde. Pas celle de l’âme, mais celle du corps. Pour s’appartenir davantage, ils vont sonder leur propre corps comme on sonde des corps malades à la recherche d’une pathologie. On plonge alors dans l’interdit. Roberto Garzelli montre très bien les deux moyens d’expression de cet amour dévorant que sont les scènes d’amour torrides et les explorations médicales des corps qui, elles, n’ont rien d’érotique.

le sentiment de la chair 3Dans la seconde partie du film, on frôle à chaque instant l’improbabilité de cette histoire d’amour. Et pourtant on y croît jusqu’au bout pour deux raisons : les personnages principaux n’étaient pas psychologiquement instables au début de leur relation et le réalisateur n’a jamais franchi le seuil du registre fantastique malgré son sujet propice au surnaturel.

La réussite de ce premier film doit beaucoup au talent vertigineux de ses acteurs. Thibault Vinçon incarne ce médecin passionné avec un mélange subtil de détermination, de gravité, de soumission et de lucidité. Sa performance lui vaut d’ailleurs une pré sélection pour le César du meilleur espoir masculin. Il a notamment joué au théâtre pour Mesguish, Sobel et Podalydès. Sa partenaire à l’écran Annabelle Hettmann se défend par sa beauté naturelle et envoutante, une grâce et une souplesse désarmantes (elle a fait ses classes à l’Opéra de Paris !) qui donnent à son personnage toute la naïveté de la jeunesse et la douleur immense qu’il imposait.

le sentiment de la chair 5Avec ce scénario atypique, Roberto Garzelli a pris le risque de nous éloigner de ses personnages et de nous dégoûter de l’anatomie. Or, il parvient à nous emmener très loin dans leur obsession, sans nous malmener. Demeurent en effet toujours une pudeur et un mystère qui marquent la distance avec l’insoutenable et une sensualité qui nous fait vibrer sans presque jamais nous émouvoir. Etonnante et destabilisante sensation.

 

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